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Relocalisation alimentaire : quel avenir politique ?


Santé conjuguée n°102 - mars 2023

L’affirmation du localisme alimentaire semble susceptible de rassembler largement. Au point que l’on trouve aujourd’hui, sous la bannière du « local », aussi bien des mouvements progressistes que les partisans d’un conservatisme appuyé voire d’une droite extrême.

Les sociétés industrialisées occidentales sont traversées par une tendance singulière : le développement des circuits courts alimentaires de proximité. Si c’est l’idée d’un retour à une alimentation locale, d’une relocalisation alimentaire qui prévaut aujourd’hui, il faut souligner que certains circuits courts alimentaires – vente à la ferme, marchés de producteurs de plein vent, stands fermiers au bord des routes, etc. – n’ont jamais complètement disparu. Dans certains pays industrialisés, ces modes de distribution ont perduré, même si leur visibilité, avec l’apparition de l’agro-industrie et des structures de grande distribution, s’est considérablement réduite pendant un temps. Les circuits courts sont donc, pour ainsi dire, de retour – mais surtout en raison du fait que d’autres initiatives sont venues compléter les anciennes : vente de paniers sur internet, groupes d’achats communs, magasins de producteurs, etc1.
En outre, l’attention politique et médiatique portée sur eux est de plus en plus importante. Le contexte qui est le nôtre explique cette attention appuyée : les différentes crises – pandémie, invasion de l’Ukraine, et bien sûr réchauffement climatique – ont mis en lumière la valeur de l’approvisionnement local s’agissant des denrées alimentaires. Enfin, parce qu’elle s’accompagne souvent du plaidoyer pour une écologisation des pratiques agricoles, pour une autonomie retrouvée du côté des producteurs, et pour le droit à une alimentation saine pour les consommateurs, la relocalisation alimentaire rejoint les ambitions qui sont portées par les défenseurs de la transition écologique et de la souveraineté alimentaire. Étonnamment à première vue, l’extrême droite évoque elle aussi très favorablement la relocalisation alimentaire. Dans plusieurs sociétés européennes, et en France notamment, on entend désormais ses leaders vanter les mérites des circuits courts. Ceux-ci valoriseraient les terroirs et contribueraient à faire renaître les traditions culinaires d’antan ; ils constitueraient aussi une opportunité de faire revivre ces espaces ruraux méprisés par les élites urbaines et mondialisées. Comment comprendre ce discours ? La relocalisation alimentaire constitue-t-elle une perspective foncièrement conservatrice ? Et si ce n’est pas le cas, comment distinguer le « local » progressiste du « local » défendu par l’extrême droite ?

Petite histoire du « local »

Ces interrogations imposent un geste de clarification. De quoi parle-t-on quand on mentionne le local ? Surtout, quand cette notion a-t-elle fait son apparition ? En géographie, le local désigne une échelle spatiale et un consensus s’est formé autour de l’idée que cette échelle est celle de l’infranational. Le local qualifie donc des espaces plus petits que ceux qui sont recouverts par les États-nations – ou encore des espaces situés à l’intérieur des États-nations2. Ceci conduit à noter une imprécision imprégnant le débat public : on y assimile fréquemment le local au national – en enjoignant, par exemple, à consommer local, c’est-à-dire à consommer français. Pourtant, le local, si l’on s’en tient à ce qu’en disent les géographes, ne peut désigner l’État-nation. Cette assimilation du local au national est signifiante – nous y reviendrons.
L’idée du local a émergé à la fin du XIIe siècle, au moment de l’entrée progressive dans les temps modernes. Le processus de modernisation sociale et économique qui va faire entrer l’Europe dans la modernité se met en marche. Ce progrès économique majeur, qui culminera avec la révolution industrielle au XIXe siècle et progressera encore avec le développement des transports et des voies de communication, a véritablement bouleversé les structures sociales et spatiales. Les communautés humaines, jusque-là isolées les unes des autres, se sont progressivement désenclavées3. Autrement dit, d’un corps social fragmenté en une multitude de petites sociétés est né un nouveau type de société, plus large, plus complexe, mécanisée, industrialisée et unifiée par un même marché. Surtout, cette « grande société » se caractérise désormais par une certaine indifférence aux anciens lieux. Dans ces nations en devenir et au sein desquelles la pensée libérale se déploie, les ancrages locaux sont en effet renvoyés au passé.
Cependant, cette évolution ne fait pas l’unanimité : elle est rejetée, au tournant du XVIIIe et du XIXe siècle, par les forces réactionnaires et conservatrices, portées par des penseurs comme le Français Joseph de Maistre ou encore l’Irlandais Edmund Burke. La disparition du local et de ses petites communautés risque, selon eux, d’engendrer une société abstraite au sein de laquelle toute solidarité aurait disparu – or l’abstraction de la société est un processus qui, précisément, met en péril la nation4. Soulignons donc un point : les forces réactionnaires mettent la défense des lieux et des traditions au service d’un État-nation. La défense du local, pour les réactionnaires et les conservateurs, ne s’oppose donc pas à la défense du national. Au contraire, le nationalisme conduit à la défense des particularismes locaux à l’intérieur de la nation, et certainement pas à un plaidoyer pour son homogénéisation5.
Au XIXe siècle et par la suite, une autre coloration politique du penser local apparait : la conception anarchiste puis socialiste du local. Contrairement aux forces réactionnaires qui défendent un État-nation, le courant anarchiste, porté notamment par Pierre-Joseph Proudhon, Piotr Kropotkine et Elisée Reclus, se fonde sur l’idée que l’échelon local est celui au niveau duquel les individus sont le plus libres. C’est à l’échelon local en effet que les individus peuvent mettre en place des organisations coopératives de production et de consommation au sein desquelles liberté individuelle et autonomie collective s’épousent6. C’est à cette échelle, finalement, que les individus peuvent se réapproprier une maitrise et un contrôle de la vie sociale et économique. Contrairement au local tel qu’il est conçu par les réactionnaires, le local défendu par les anarchistes est en tension avec l’échelon de l’État-nation. Cette idée de créer, en décalage avec la vie économique nationale, des formes locales d’autonomie, a d’ailleurs été reprise par le socialisme municipal, dont le Belge César De Paepe fut au XIXe siècle un représentant éminent. Ainsi, le local, dans la pensée progressiste, renvoie à la coopération – avec cette caractéristique singulière que c’est à l’échelle locale qu’une véritable coopération, choisie et pensée par les individus, pourrait se déployer. Autrement dit, pour les anarchistes et les socialistes, c’est quand la coopération s’organise au sein d’un espace local qu’elle est le plus à même de nourrir la liberté individuelle et collective.

Un terreau propice à l’extrême droite ?

Entre ces deux compréhensions du local, celle qui a été façonnée par les réactionnaires et les conservateurs – et qui est devenue celle de l’extrême droite aujourd’hui – a obtenu une victoire historique sur celle que les anarchistes et les socialistes ont construite. Comment comprendre cela ? Là encore, c’est une trajectoire historique spécifique qui l’explique. Il convient de remonter jusqu’à l’entre-deux-guerres lorsque le libre-échange s’est, depuis la fin du XIXe, développé en Europe. Au cours de cette période, les paysans fustigent cette économie dérégulée et mondialisée, justement parce que celle-ci met en péril l’appartenance nécessairement territoriale et locale de leur activité – les paysans vendant alors aux habitants de leurs bassins de vie. Or, à cette époque, ce sont les forces conservatrices qui leur prêtent une oreille attentive et viennent embrasser leur revendication. En d’autres termes, la résistance sociale des paysans, visant le maintien de l’inscription locale de leur activité, a été récupérée, politiquement, par l’extrême droite7. Le processus pourrait être en train de se répéter aujourd’hui avec la relocalisation alimentaire : la résistance qui s’y joue trouve un écho à l’extrême droite. Comment comprendre que le local agricole et plus largement alimentaire soit si aisément récupérable par l’extrême droite – davantage, peut-être, que le local d’une monnaie commune ?
En fait, le local agricole et alimentaire renvoie aux caractéristiques biophysiques, naturelles, d’un territoire. À ce titre, il est une ressource de mobilisation affective sur l’identité, la mémoire, les ancêtres. Autrement dit, le territoire local, à travers sa matrice naturelle, renvoie à des éléments d’ordre et de tradition8. L’extrême droite l’a très bien compris, et c’est pour cela qu’on la trouve au premier plan de la défense de la relocalisation alimentaire. Toutefois, aujourd’hui comme hier, le local qu’elle défend se trouve être au service d’un projet nationaliste et identitaire. On note donc que si l’extrême droite défend la relocalisation alimentaire et les petits circuits courts dans les territoires reculés, elle ne remet pas en cause le souverainisme néolibéral étatique qui, sur le plan agricole, consiste à accentuer des logiques d’exportation agricole censée renforcer la puissance nationale sur la scène économique extérieure. Si les partisans de l’extrême droite chantent aujourd’hui les louanges du territoire local, du terroir, c’est-à-dire d’une forme de patrimoine agricole immuable, il n’en demeure pas moins que ces terroirs doivent, dans leur esprit, produire des denrées labellisées, destinées aux circuits longs, aux marchés mondiaux, et certainement pas uniquement à la consommation locale. Dans la relocalisation alimentaire prônée par l’extrême droite, local et national vont donc ensemble : identité et puissance nationaliste vont main dans la main.
Les acteurs investis dans la relocalisation alimentaire et plus précisément dans des initiatives qu’eux-mêmes jugent progressistes ont sans doute un rôle à jouer dans la différenciation de celle-ci d’avec sa version conservatrice. L’enjeu est de taille et il n’est pas question, sur le plan idéologique, de légères nuances. Dans la relocalisation alimentaire progressiste, le terme d’autonomie est préféré à celui de souveraineté, notamment parce que le second est étroitement lié à l’autorité nationale étatique telle qu’elle s’est façonnée dans les sociétés modernes. Dans la relocalisation alimentaire progressiste, c’est l’émergence de territoires traversés par des réseaux locaux de coopération agricole et alimentaire qui est visée, et non le renforcement de la puissance nationale. Enfin, pour les progressistes, le territoire local n’est pas appréhendé à travers son identité biophysique ; autrement dit, le territoire local ne s’identifie pas au terroir. L’émergence du territoire résulte de la mise en réseaux de coopération d’acteurs qui sont proches géographiquement : des producteurs d’un même territoire qui mettent en route des magasins ; des artisans transformateurs qui valorisent des produits ; des consommateurs qui forment des groupes d’achats – et, étayant toutes ces démarches, des relations, des liens entre ces acteurs pour leur permettre d’organiser les filières de production et surtout les conditions de la vente – en un mot, un tissu socio-économique au sens propre. Car au bout du compte, c’est toute une diversité de chaines qui vont mailler un territoire. Ainsi, la notion qui se trouve au cœur d’une relocalisation alimentaire progressiste est celle de la coopération économique et sociale. Ce n’est pas celle de l’identité. Ce n’est donc guère étonnant que le localisme progressiste soit indissociable d’une forme d’ouverture sur l’extérieur. On le voit très bien sur la question des semences. Dans la perspective extrême droitière, les semences sont liées à un terroir et ne doivent pas en sortir, car elles participent de son identité immémoriale. Dans la vision progressiste de la relocalisation alimentaire, les semences doivent circuler d’une région à l’autre, et elles doivent être croisées pour démultiplier les possibilités agricoles.

Pour conclure…

À part l’échelle spatiale strictement géographique, il y a bien peu en commun – si ce n’est rien – entre la relocalisation alimentaire progressiste et le localisme d’extrême droite. Projet d’autonomie locale d’un côté, projet nationaliste de l’autre – les différences ne sont pas que de nuances, et elles ont une longue histoire. Celle-ci rappelle du reste l’incompatibilité essentielle des idées socialisantes et des idées réactionnaires. Il est important de se remémorer cette histoire aujourd’hui afin de mettre en lumière le risque réel d’une récupération pleine et entière de la relocalisation alimentaire par l’extrême droite – loin, très loin des idées d’autonomie locale par la solidarité et la coopération entre les individus et les groupes.

  1. L. Chaffotte, Y. Chiffoleau, « Vente directe et circuits courts : évaluations, définitions et typologie », Les Cahiers de l’observatoire CROC, 2007.
  2. B. Giblin-Devallet,
    « La géographie et l’analyse du “local” : le retour vers le politique », dans A. Mabileau, à la recherche du local, L’Harmattan, 1993.
  3. E. Durkheim, De la division du travail social, 8e édition [1895], Presses universitaires
    de France, 2013.
  4. E. Durkheim, « Communauté et société selon Tönnies » [1889], Sociologie, n° 2, vol. 4, 2013.
  5. S. Audier, La société écologique et ses ennemis. Pour une histoire alternative de l’émancipation, La Découverte, 2017.
  6. K. Ross, L’Imaginaire de la Commune, La Fabrique, 2015.
  7. K. Polanyi, La Grande Transformation. Aux origines politiques et économiques de notre temps [1944], Gallimard, 2009.
  8. . Charbonnier, « Quand les réactionnaires se mettent au vert », AOC, mai 2018.

Cet article est paru dans la revue:

Santé conjuguée, n°102 - mars 2023

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