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« L’inceste, Monsieur, êtes-vous sûr qu’il soit vraiment interdit…? »


Santé conjuguée n° 37 - juillet 2006

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Si la question de l’inceste subodore l’existence d’un « désir » obscur, la réalisation de ce dernier surfe sur la nébuleuse d’un interdit. S’éloignant d’une lecture oedipienne classique, cet article resitue à travers l’analyse transgénérationnelle, la problématique de l’inceste auprès des parents géniteurs. Il postule – à cet égard – une pulsion infanticide et incestueuse d’origine parentale interpellant une position existentielle. L’inceste est abordé dans son mouvement paradoxal: ambitionnant la vie, il ne sème que la mort. L’interdit fait son apparition comme circonscripteur essentiel des espaces psychiques. Enfin, la clinique nous amène à examiner les carences d’intégration transgénérationnelles de cet aspect de la Loi menant dès lors vers une confusion des espaces privé – public.

Initier une réflexion

1. Une question impertinente…? Cette question, qui peut surprendre certains, m’était posée par une jeune étudiante assistante sociale lors d’un de mes séminaires consacré aux phénomènes violents1. Ce questionnement «candide» posé par une jeune adulte paraît bien refléter une méconnaissance sociale endémique, alimentant par ailleurs des passages à l’acte douloureux pour un nombre impressionnant de citoyens. Il est, en effet, ahurissant d’entendre dans l’enceinte « sécurisée » de séances de psychothérapie, que celles-ci soient individuelles, familiales ou de couple, le nombre de personnes ayant subi (plus rarement commis) des transgressions sexuelles au sein de leur propre famille ou proches apparentés. Quoiqu’il faille rester vigilant à ne pas confondre les productions fantasmatiques de certains avec une réalité des faits, ceux-ci sont vraisemblablement bien plus fréquents, qu’autrefois soupçonnés. Ces situations fleurissent dans tous les champs socio-professionnels et ne sont absolument pas l’apanage de classes sociales dites « défavorisées». En outre, elles prennent insidieusement un caractère répétitif au cours d’une même vie et traversent régulièrement les générations. A cet égard, les faits divers actuellement fort médiatisés couvrant des actes pédophiles (affaire Dutroux, Fourniret…) représentent vraisemblablement le sommet d’un iceberg d’incestes masqués et de relations incestueuses prononcées. Par ailleurs, la méconnaissance d’une prohibition universelle de l’inceste, aspect dont nous débattrons ultérieurement, est prégnante dans le monde des soignants et ce, y compris auprès de certains psychanalystes… inceste.gif Des thérapeutes familiaux, des infirmie(-ères)rs, des médecins et autres gynécologues m’ont demandé si j’étais certain de l’existence universelle d’une telle prohibition de l’inceste…; des conseillers conjugaux m’ont déclarés que, selon eux, la Loi, c’est- à-dire l’interdit du meurtre et de l’inceste, n’était qu’une affaire de psychanalyste…; une psychanalyste avançait que, selon elle, l’adultère est une in- fraction à la Loi, et de ce fait, se situe au même niveau de gravité que l’inceste… Abordons dès lors, cette délicate question à travers un exemple… 2. Petits « meurtres » en toute confiance familiale… Mme G., enseignante, vient consulter pour et avec son fils Sigismond de 13 ans, qui présente des problèmes d’apprentissage scolaire… Au cours d’un entretien préliminaire, j’apprends l’existence de Clorinthe2 (16 ans), sœur de Sigismond ainsi que celle d’un beau-père. Ceux-ci seront conviés aux entretiens familiaux. Le beau- père se désiste. Lors de cette deuxième séance, Clorinthe nous apprend qu’elle subit des attouchements de la part de son beau-père et qu’elle ne veut plus le voir. Lorsque Clorinthe raconte cet épisode, sa mère fond en larmes car – déjà – elle s’était séparée de son premier mari et père de Clorinthe, qui avait abusé de celle-ci: aucune plainte n’avait été déposée auprès de la justice. Par la suite, Madame G. nous raconte qu’elle-même avait fait l’objet d’abus sexuels commis par son cousin et que sa mère lui avait interdit d’en parler à son père – qui jamais ne pourrait s’en remettre: «si tu lui dis ça, il en mourra ! »… Un deuxième « secret » pourra alors être abordé dans cette famille: Madame G. est alcoolique et ses enfants en souffrent… 3. L’inceste, révélateur de la confusion de penser… Nous voyons ici la dynamique transgénérationnelle d’un abus sexuel qui s’enracine paradoxalement dans la protection de l’adulte… En effet, la mère de Mme G. privilégie la «protec- tion » de son époux et père de leur enfant au détriment de cette dernière. Par voie de conséquence, la mère se protège elle-même en défendant sa construction «narcissique» traduisant son image de mère, de femme et d’épouse. En réalité, elle ravale son mari à un statut de nourrisson incapable de se défendre: «si tu le lui dis: il en « mourra»»! La mère confusionne ainsi le sens des interdits et l’inocule à sa fille qui – par besoin d’amour – ne peut y échapper. Ce ne sont plus les parents qui doivent protéger leurs enfants mais bien le contraire: les enfants doivent protéger leurs parents autrement ceux-ci meurent ! L’interdit n’est, dès lors, plus l’inceste mais devient faire «mal» à son papa et à sa maman et les tuer – pour du vrai – de douleur…! La parole de l’enfant devient meurtrière et toute puissante – pour du vrai! Nous retrouvons ainsi l’essence de l’inceste : l’inversion du temps, de la place et du sens. La confusion s’opère autour de la question de vie et de mort dont le fantasme, induit par le parent, prend le pas sur la réalité de la mort. Dans notre exemple, la mère transmet également sous forme d’une règle «occulte» le fait qu’un enfant mâle ne devient jamais adulte et protecteur de ses enfants: un père est géniteur et simultanément petit garçon en culottes courtes qu’il faut à tout jamais proté- ger de la mort. Sa femme (c’est-à-dire, la mère de Mme G) en devient sa «mère» et doit légitimement le protéger ! L’enfant devant protéger son parent de sa propre mortalité se voit condamné à une mort psychique car on lui fait endosser un travail qui n’est pas le sien. C’est de cette confusion dans le temps et dans l’espace que Madame G. ne parvient à sortir, se choisissant par allégeance familiale des partenaires infantiles. Elle ne peut qu’y entraîner sa propre descendance dans une répétition autant mortifère que compulsive. Cet exemple illustre également la contamination de la pensée qui diffuse auprès des proches. Sigismond ne parvient plus à organiser sa pensée: tout y est déposé dans un double langage. Il ne parvient donc plus à apprendre à l’école. L’interdit de la parole induit par le parent – pour éviter la mort – ne fait que se traduire par le passage à l’acte de ce qui fait mort «dans la tête». J’entends par là, que l’abus sexuel ne tue pas corporellement : il reste invisible et «tue» l’individu dans son âme et sa capacité de se penser. La question de l’inceste et sa prohibition universelle 1. Accents définitoires et relents anthropologiques La question introductive à ce texte interroge ce qu’on entend par le terme inceste ainsi que l’hypothétique réalité de sa prohibition. Par ailleurs, celui- ci est-il interdit de manière universelle ou localement, de façon aléatoire ? Dans l’affirmative d’une prohibition, comment en comprendre le sens? Le terme inceste dérivant du latin incestus (non-chaste), désigne les « relations sexuelles entraînant la prohibition du mariage » (Petit Robert). Cette définition entraîne au moins deux questions: la première est relative à la fonction du mariage et ses restrictions établies dans des lois; la seconde interpelle la raison même de l’existence d’une telle loi. Si le mariage se définit traditionnellement3 par l’« union légitime d’un homme et d’une femme» (Petit Robert), il semble bien avoir été créé par l’Homme afin de protéger sa pérennité dans le cadre le plus sécurisant qu’il ait inventé. Cette pérennité, soumise à une relation hétérosexuelle féconde, s’associe à celle des biens matériels qui, selon les périodes socio-historiques, lesquelles ancreront les représentations, raffermit la survivance de l’individu dans un groupe social considéré. Ainsi, vaut-il mieux selon certaines représentations, épouser la fille d’un riche fermier voisin, que la «souillon» du village… Tout comme il est préférable d’épouser un jeune diplômé universitaire qu’un artiste basané et impécunieux… Un mariage n’aurait de valeur que s’il est validé par l’Eglise… L’interdit de certains mariages vient ainsi interroger la capacité de survie – imaginaire ou réelle de l’individu – qu’un groupe social institue à travers une telle loi. Il se fonde sur la connaissance acquise selon laquelle une relation sexuelle entre partenaires de sexe différent et ayant atteint l’âge d’être fécond constitue le meilleur moyen de reproduire un humain – à leur image – afin qu’ils (les parents, le groupe social) ne s’éteignent pas. C’est pour cette raison que le lien du mariage suppose – souhaite, dirait-on actuellement- son indestructibilité temporelle. L’interdit posé sur certains mariages laisse sous- entendre que l’enfant issu de certains rapports sexuels est dommageable tant pour la survie de l’individu que du groupe social dont il émane: c’est dire que ces enfants représentent la mort et l’arrêt de l’histoire plutôt que la vie et sa continuité. Si les liens de parenté interdisant le mariage fluctuent à travers le temps et les régions, toute société pose des interdits à certains mariages dont une constante absolue: l’union d’un parent avec l’enfant né de son sang. Si certaines sociétés permettent l’union sexuelle frères- soeurs, il s’agit majoritairement d’unir des demi-frères ou sœurs (cas des pharaons ayant de nombreuses concubines) et ce, au sein d’organisations sociales particulièrement rigoureuses. Signalons également l’émergence possible d’un sentiment incestueux dans certaines relations sexuelles malgré le caractère légal d’une union. A titre d’exemple nous citerons le cas de Woody Allen qui, ayant épousé sa «belle-fille», en réalité la fille adoptive de Mia Farrow, qui fut sa com- pagne des années durant, induit – auprès de certains – ce genre de sentiment réprobatoire. A ce stade, nous pouvons donc avancer que l’inceste connaît une prohibition universelle de par l’existence d’une délimitation des liens du mariage posant une restriction à la descendance humaine dont une est absolue: la relation sexuelle parent- enfant. Cette prohibition semble reposer sur la représentation de vie et de mort acquise par l’Homme et l’impératif apparent de ne pas arrêter l’histoire. Elle ne peut être circonscrite à la venue supposée d’une altération génétique mais bien à la «qualité» du lien à l’autre où la représentation de vie s’éteint au profit de celle de la mort. Autrement dit, dans le cas d’une naissance d’un enfant, fruit d’un inceste, nous aurons davantage des parents ayant un comportement « fou » et profondément maltraitant, qu’une altération génétique: « Les examens médicaux de cohortes d’enfants nés d’incestes révèlent une forte mortalité- morbidité. Mais l’analyse sémiolo- gique de ces maladies démontre que les altérations organiques sont attri- buables à des troubles relationnels (déshydratation, dénutrition, infec- tion, accidents) plutôt qu’à des mala- dies transmises génétiquement»4. 2. De l’anthropologie à l’inscription dans le mythe olympien de la création Cependant, si l’interdit de l’inceste est profondément acquis, assimilé dans les gènes comme fait inné, pourquoi l’interdire? L’anthropologue Frazer, contemporain de Freud pose à l’aube du XIXème une réflexion audacieuse: « On ne voit pas bien pourquoi un instinct humain profondément enraciné aurait besoin d’être renforcé par une loi. Il n’y a pas de loi ordonnant à l’homme de manger et de boire ou lui défendant de mettre ses mains dans le feu»5. Frazer met ainsi en évidence le besoin compulsif de l’homme à tuer (d’où l’interdit du meurtre) ainsi qu’à commettre un inceste. Si Freud utilise cette réflexion pour introduire le complexe d’Oedipe dans les processus d’identifications, il y fige toutefois l’enfant dans le rôle de révélateur d’une impulsion incestueuse et meurtrière en envisageant exclusivement un regard ascensionnel: celui de l’enfant vers le parent. De ce fait, il exonère les parents d’instruire une pulsion infanticide et incestueuse anticipativement à celle de l’enfant. Pourtant, le récit d’Oedipe-Roi de Sophocle est éclairant à ce sujet. Pourquoi la mère (Jocaste) et le père (Laïos) vont-ils tuer leur fils Oedipe? Très simplement, car l’oracle leur avait prédit que s’ils avaient un enfant, celui-ci tuerait le père et coucherait avec sa mère. L’infanticide opéré a donc pour mission essentielle la survie des parents ! D’autre part, Jocaste entretient une relation sexuelle avec un homme – Oedipe – dont elle ne peut ignorer la similitude d’âge avec son propre fils qu’elle a mis à mort… La pulsion incestueuse d’origine parentale recouvre donc bien la pulsion infanticide6 qui, chronologiquement est antérieure à la première citée. Par ailleurs, l’analyse transgénérationnelle d’Oedipe laisse apparaître la répétition compulsive de l’infanticide et de l’inceste initié sur l’Olympe par Gaia (mère des origines) qui auto-engendre son fils (Ouranos). Celui-ci devient son amant et tente d’éliminer leurs enfants afin de rester seul avec et «dans» Gaia, sa mère-épouse. L’inceste qu’opère Jocaste avec son fils Oedipe, lointain descendant du couple incestueux originaire Gaia – Ouranos, présente l’indubitable avantage d’une cure de jouvence. En effet, outre qu’elle méconnaît son âge d’être la mère du jouvenceau qui se présente à elle, Jocaste devient la grand-mère de ses propres enfants (Polynice, Etéocle…) via Oedipe, tout en étant leur mère: statut qui la rajeunit considérablement eu égard à celui de grand- mère. Oedipe est ainsi le demi-frère de son propre fils, Polynice… Si Polynice a pour frère Etéocle, ce dernier est par ailleurs son oncle car étant le demi-frère d’Oedipe… Bref, la pratique de l’inceste crée la confusion du temps et des liens de parenté (la place) au sein des structures familiales. Le parent « saute » un cran générationnel, visant ainsi une jeunesse éternelle. Plus personne ne sait au juste qui il est, car chacun peut endosser à loisir une ou plusieurs positions de parenté: l’inceste mène à un multipositionnement intra- familial. Cette caractéristique est à l’aube de ce qu’on appelle le double langage ou langage paradoxal figeant les partenaires dans des doubles liens. Quoique inévitable auprès de l’humain, il peut imprégner trop massivement les liens familiaux et ainsi donner naissance aux familles incestueuses et psychotiques. Comme on peut le constater, autant dans la version mythologique que dans l’exemple clinique proposé, la pratique de l’inceste protège le parent vis-à-vis de sa propre mort en opérant un tour de passe-passe afin de se rajeunir. L’inceste représente donc une protection paradoxale vis-à-vis des «représentations» de la mort non-pensable auxquelles sont confrontés les parents. Ceux-ci, afin d’éviter les souffrances que de telles «représentations» charrient, contaminent par voie psychique et corporelle l’enfant qui ne peut s’y soustraire. A cet effet, les parents produisent des mécanismes d’intrusions psychiques semblables aux identifications projectives7. Il y a ainsi lieu d’envisager que d’une part, l’impulsion première de l’inceste s’étaie sur le caractère non-pensable de l’au-delà de la mort. D’autre part, cette impulsion est introduite par le parent qui, in tempore non suspecto, existe de fait avant son propre enfant. Ce que j’ai dénommé le complexe Labdacide8, en référence à la lignée royale à laquelle appartient Oedipe, introduit la notion d’une pulsion infanticide et incestueuse d’origine parentale antérieure à celle révélée par le complexe d’Oedipe. Pour rappel, cette lecture psychanalytique considère l’émergence d’une pulsion incestueuse et parricide d’origine infantile et en appelle à l’interdit posé par le parent. En réalité, cette version oedipienne escamote la chronologie et, inversant le temps, perpétue la protection des parents tout en réduisant le sens d’une pulsion incestueuse à répétition. Si l’on envisage – a contrario – que des parents auraient des pulsions incestueuses car n’ayant pas «réglé» leur propre Oedipe, il y a lieu de considérer qu’au sommet de la pyramide du temps trône Oedipe, c’est-à-dire, l’enfant. A cet égard, on ne peut que conclure que le complexe d’Oedipe envisagé dans son exclusivité contra-temporelle ne peut aboutir qu’à une monumentale parentalisation (l’enfant devient le parent de son propre parent), l’enfant ne pouvant, par ailleurs, jamais atteindre le stade adulte. La prohibition de l’inceste comme circonscripteur des espaces psychiques Si l’inceste évoque le plus régulièrement une relation sexuelle au sein de la famille ou des proches apparentés enfreignant la Loi, il représente – somme toutes – le reflet d’une absence : le symbolique. Cependant, qu’est-ce qu’il y a lieu de symboliser là ? Selon toute vraisemblance, «quelque chose» qui concerne la vie et la mort et qui se délimite dans l’espace et le temps. C’est-à-dire que ce symbolique là s’attarde à tenter de déterminer un sujet pouvant dialectiser avec ce qui peut être perçu et nommé comme « autre ». C’est là où, me semble-t-il, la prohibition de l’inceste rejoint le plus la quotidienneté de l’Homme. Cet interdit nous interpelle dans notre banalité journalière car il interroge notre capacité à nous positionner face à «l’autre» et de ce fait questionne l’accès à une parole différenciatrice face à « l’épou(se)x », l’enfant fille ou garçon, le parent, le collègue, l’institution… En effet, la réalité de l’inceste met en évidence le fait que les positions intrafamiliales sont non-délimitées, se juxtaposent ou s’inversent. Cette absence de délimitation correspond à l’évitement ou l’incapacité parentale de s’inscrire dans le temps qui est le leur. Ceci induit pour la descendance un brouillage temporel sollicitant une permanence de passage à l’acte afin de trouver une position un tant soit peu satisfaisante. L’inscription parentale dans le temps enjoint un couple procréateur à se concilier avec la question de la mort non-pensable afin de donner du sens à la vie et ce, anticipativement à l’enfant. Enfin, l’incapacité parentale à pouvoir définir les positions spatio-temporelles de tous les acteurs familiaux est concomitante d’une incapacité de se penser en termes de sujet. Il en résulte une difficulté majeure à penser le lien à un «autre» qui, dans un tel dispositif, est de nature volatile. Si l’acte d’inceste fait apparaître la dilution des positions spatio- temporelles au sein de la famille suite à l’incapacité de pouvoir penser le lien car n’ayant pu tracer du symbolique pour traverser la douleur des différences, sa prohibition est le vecteur majeur afin de circonscrire les positions intra-familiales dans le temps et se penser dans les différences et dans le lien. L’interdit de l’inceste apparaît de telle sorte comme vecteur essentiel afin de délimiter un espace psychique vis-à-vis d’un autre. Cette délimitation se fait en regard de l’inscription du temps et de la différence des sexes9. Vu sous cet angle, la prohibition de l’inceste est à l’œuvre de façon permanente : il est même impossible d’y échapper car Cronos s’en charge pour nous. Le temps défilant par-devers nous mobilise notre position dans le temps et donc également vis-à-vis de «l’autre». On n’arrête pas de tenter de se délimiter face à «l’épou(se)x», aux enfants, aux parents, aux voisins, amis, collègues, institutions… quitte à s’y perdre pour espérer s’y retrouver… Cependant, la configuration matricielle du positionnement spatio- temporel repose sur l’intégration familiale de l’interdit, animée par les parents qui y endossent le rôle de chef d’orchestre. C’est eux qui auront cette rude tâche à devoir affronter et penser les relents du non-pensable afin de les transformer en liens de vie. Le symbolique, c’est eux qui – prioritairement vont devoir l’introduire à travers la parole, traductrice de leur capacité à métaboliser le ressenti. C’est cette parole, issue d’un « intérieur » et déposée à «l’extérieur», qui s’offre comme intervalle et permet qu’il y ait de l’entre-deux, autre que du rien, du vide, du néant… L’interdit de l’inceste, lorsqu’il est signifié par la parole parentale et agi selon une cohérence suffisante donne accès à la différence, ouvre la voie à l’altérité et évite l’indifférenciation. Car c’est de là que surgira l’acte d’inceste : lorsque, dans une famille, les places n’ont pas été nommées et ne sont ni respectables ni respectées… lorsque les différences ne sont ni dites ni maintenues dans une cohérence suffisante… lorsque la parole ne veut plus rien dire, car elle veut « tout » dire… lorsque plus rien ne peut se délimiter dans un temps, car le temps n’est plus, il se confond avec celui de l’éternité… La confusion des espaces psychiques engendre la confusion à pouvoir se penser en termes de sujet différent d’un « autre ». L’identité d’un sujet tend de telle sorte à se confondre avec le groupe-magma familial, le groupe socio-culturel, la « chose »… La confusion des espaces s’instruit dans l’enceinte familiale et s’illustre sous diverses formes. Par ailleurs, cette confusion peut gangrener des structures institutionnelles. Je vous propose quelques exemples succincts des confusions jaillissant dans les enceintes familiales, publiques et professionnelles.

Confusion des espaces

1. Confusion des espaces psychiques intra-familiaux La confusion des espaces et du temps – Raymond D. et Germaine F. ont deux enfants qu’ils prénomment Raymond et Raymonde. Raymond D. – fils a un un héritier qu’il nomme en souvenir de son père décédé, Raymond. Interprétation : Dans une telle composition familiale, l’aïeul n’est toujours pas décédé. Le petit-fils se doit de l’incarner avec toute la restriction que cela suppose pour son propre espace psychique…; – Une mère prépare simultanément les tartines de son époux et de son fils ainsi que leurs vêtements pour la journée… Interprétation : Pour l’enfant, l’adulte-homme n’est guère différent qu’un petit garçon et une femme se réduit à l’état exclusif d’une mère… – De cette confusion spatio-temporelle nous en décelons les traces jusque dans nos publicités télévisées actuelles: un homme regarde un match de football avec son fils de +/- 5 ans en dégustant des zakouskis qu’il trempe dans une sauce. Une grosse goutte tombe sur sa chemise et on entend la voix de l’enfant dire 1 – 0. A 2- 0, le père se rendant compte du désastre dit « maman ne sera pas contente ». Il fonce mettre sa chemise dans la machine à laver additionnée de la «poudre miracle» (c’est une pub pour produit de lessive). «Maman» rentre et, «miracle», elle ne se rend compte de rien. Un sourire de connivence s’adresse entre le père et le fils. Interprétation: L’homme-père est à nouveau présenté comme infantile, confondant la mère de leur enfant avec sa propre mère à laquelle il doit rendre des comptes… et craint surtout, la fâchant, de perdre son amour «pour toujours»… Une épouse devient ainsi la mère de son propre mari. Le mari-père devient une sorte de grand-frère de son enfant. inceste2.gif La confusion de l’espace privé intra- familial et de l’espace commun familial – Lors de la construction d’une nouvelle habitation et sous le couvert d’une modernité, des parents imaginent les espaces de vie sans aucune porte : il n’y a pas de portes aux chambres, toilettes, salle de bains… Le bruit des ébats amoureux des parents diffusent dans toute la maison… Les parents se baladent «à poil» devant leurs enfants… La défécation a lieu, pour ainsi dire, en famille dans ce qui pour chaque membre apparaît «normal» et simultanément «trouble»… Interprétation : Ici, on ne parvient à distinguer ni l’espace privé du couple adulte de l’espace privé de l’individu… ni celui d’un espace familial ouvert au partage commun. – Une mère prend son bain avec sa fille adolescente… Interprétation : Dans un tel cas, le caractère sexuel privatif de la jeune fille est nié et l’infantilisation (l’abrasion de la réalité temporelle) des deux protagonistes est maintenue. Négation d’un espace privatif fondamental: la différence des sexes Un couple voit naître un enfant garçon alors qu’ils souhaitaient ardemment une fille. Ils se mettent à habiller leur petit garçon en petite «fille»… Confusion dans l’espace parental Dans une famille, le fils décide des programmes télévisés en accord avec sa mère et le père n’a qu’à s’y soumettre ou partir… Interprétation: Le couple parental est déformé, l’enfant étant «nommé» par une mère comme parte- naire de couple, le père, se positionnant comme l’enfant de ce couple «incestueux»… Confusion de l’espace temporel, intra-familial et extra-familial Un beau-père albanais décide si sa belle-fille peut avoir un travail officiel ou doit aller travailler «sur le trottoir» sous sa houlette… Interprétation : Le beau-père ne peut considérer sa bru comme adulte et responsable et son autorité est omnipotente. Il est le roi dans et à l’extérieur de la famille, dépositaire d’une tradition tribale. Par ailleurs, son fils ne peut accéder au statut d’adulte, devant s’effacer devant la « loi » toute- puissante de son père… Confusion entre l’espace du couple conjugal et de l’espace privatif L’enfant qui geint trop longtemps au goût de certains parents est admis à passer ses nuits dans le lit conjugal. Interprétation: Cette disposition laisse apparaître la difficulté parentale de distinguer l’espace conjugal – privé – de l’espace – privé – de l’enfant : ce qui est « privé » devient dès lors « public »… 2. Confusion des espaces privatifs et diffusion dans l’espace professionnel – Une mère va avec son fils adolescent chez le médecin de famille et assiste à l’auscultation de son fils pour ensuite raconter ses difficultés conjugales au médecin qui lui, autorise et favorise ce déballage… – Un psychothérapeute pratique sa consultation dans son salon… 3. Confusion entre l’espace privé et l’espace public Ce volet est actuellement très «tendance»… J’entends évoquer ici les conversations privées au GSM qui se déroulent sous l’oreille « bienveillante » d’un public anonyme… ; une autre mode contemporaine est celle de dévoiler ses relations intimes aux médias… Etc.

Conclusions

La prohibition de l’inceste au cœur de la question de l’existentialité La question émise concernant l’existence d’un interdit posé sur l’inceste met en évidence que ce sujet n’est pas clos… Il ne peut, me semble-t-il, qu’être voué à l’interrogation car il porte en son sein la question irrésoluble de l’existentialité. Ce que je tente néanmoins de souligner dans cet article, c’est que la question de l’inceste tend à échapper aussi bien à la parole qu’à l’interrogation et ceci, autant au sein de la famille que de la société qui, à bien des égards, en est son reflet. Et cette parole qui s’esquive, qu’on laisse évanescente jusqu’à omettre son inscription dans le code pénal10, interpelle pourtant ce qui balise le fondement du fait humain. Si les événements récents qui ont secoué notre pays soulèvent la question des abus sexuels et du meurtre11, il y a lieu, me semble-t-il, de resituer l’in- ceste et son indispensable prohibition au cœur du débat. Inscrits dans des mythes fondateurs de l’humanité12 et transpirant dans notre quotidienneté, l’inceste et sa prohibition se révèlent comme berceau de la construction psychique. En effet, l’inceste prenant le relais du meurtre13 nous amène à considérer qu’il cerne la question de la vie et de la mort, non plus dans une réalité exclusivement organique – ce que nous indique le meurtre – mais bien dans son élaboration psychique. Le questionnement récurrent posé par divers interlocuteurs concernant l’universalité ainsi que l’existence même de la prohibition de l’inceste, nous rappelle qu’il ne s’agit nullement d’un acquis génétique mais plutôt d’une accommodation à la représentation de vie et de mort qui ne cesse d’interpeller l’Homme dans son advenir de sujet. Si l’inceste interroge l’impulsion particulière visant à créer une descendance «identique» à soi, court-circuitant de telle sorte l’introduction de « l’étranger » (l’inceste caractérise un dispositif intra– familial), cette impulsion témoigne – avant tout – de la difficulté que rencontre l’humain face à sa propre finitude. Cette rencontre questionnante se découvre pour le parent – de l’archaïque (inscrit dans les mythes) à l’actuel – étant confronté à l’érosion du temps qui l’amène à ce qu’il sait être l’instant ultime d’un «ici-bas». L’inceste apparaît donc comme la voie la plus directe vers l’immortalité: celle qui nous aspire vers le royaume du divin où toute souffrance devient félicité éternelle… Cependant, l’expérimentation de l’inceste entraîne la mort – pas forcément en abrégeant prématurément les fonctions organiques – mais bien en court-circuitant le sentiment d’exister en tant qu’humain sur terre. Ce «court-circuit» résulte de l’impossibilité d’endosser un positionnement intra-familial défini. L’effet du multipositionnement intra-familial que produit l’inceste et qui fait suite à la tentative parentale de geler ou d’inverser le temps à son profit, crée des doubles liens tels que la qualité du lien affectif produit par le jeu des identifications, se dissout dans le non- pensable. L’individu ne peut – dans un tel contexte – arriver à se penser en terme du sujet, si ce n’est sous forme d’un langage paradoxal. Le sentiment d’exister rejoint dès lors l’inexistant et le non-sens officie comme Loi. Cette mort-là sort en quelque sorte du règne du visible pour gagner le royaume du glauque et – partant – alimente le champ des perversions. Produisant la mort psychique, l’inceste ne peut endosser la survie de l’Homme. J’entends ainsi que l’inceste, dans son mouvement pulsionnel, ambitionne la vie. En réalité, il est confusionné et enfermé dans son fantasme d’im- mortalité, gage de l’évitement de toutes souffrances et produit de ce fait son contraire, c’est-à-dire : la mort. C’est donc sa prohibition qui révèle l’aménagement à réaliser au niveau de la psyché quant à l’au-delà de la mort, par nature non-pensable, interpellée par la finitude humaine. La prohibition de l’inceste vient ainsi s’aligner sur l’interdit du meurtre afin de confectionner l’espace psychique qui peut suffisamment contenir l’angoisse de mort et ce, en créant du lien afin de pouvoir penser celle-ci et non plus exclusivement l’agir. La question de l’inceste revêt donc – avant toutes choses – la question de la vie et de la mort mais transposée au niveau psychique. Evoquant brièvement le mythe olympien de la Création, j’ai rappelé que l’analyse transgénérationnelle menant à Oedipe et sa descendance relate l’avènement de l’humain dans une filiation où l’infanticide précède l’inceste suivi ou précédé par un parricide. L’histoire « complexée » d’Oedipe apparaît de telle sorte comme une lointaine répétition de ses ancêtres divins. J’ai ainsi postulé l’existence d’une pulsion infanticide et incestueuse d’origine parentale. Celle-ci ambitionne l’esquive de la mortalité parentale afin de rejoindre le règne du divin, auréolé de la maîtrise du temps et de l’espace. Cette option théorique permet de rejoindre Frazer supputant « l’envie » de tuer et de commettre l’inceste chez tout un chacun, dégageant ainsi l’enfant de l’exclusivité de cette charge, introduite par Freud via les «pulsions» oedipiennes. Car, la chronologie nous amène à considérer que c’est avant tout l’adulte géniteur qui se coltine au temps et à son advenir d’être mortel et ce, anticipativement à l’enfant. Poussé par des forces centrifuges auxquelles l’humain ne peut échapper, ce dernier s’évertue à inventer « trucs et ficelles » faisant office de forces centripètes. Voici donc ce qui va alimenter son ambivalence: accompagner ses forces centrifuges afin d’endosser son destin d’être mortel ou involuer, de telle sorte à retrouver cet état « fusionnel » où personne n’existe en termes de sujet. Les pulsions infanticides et incestueuses se révèlent comme forces centripètes, afin de geler et, mieux encore, inverser le temps. Présent dans l’actualité des «faits divers», l’infanticide agi témoigne de ce que la majorité des hommes parvient à déjouer. Il ne fait cependant que le déplacer vers des formes sociales consensuelles, éludant la question du sujet. Citons entre autres l’existence universelle des groupes armés: les «enfants» de la nation sont armés afin de défendre la patrie – récemment de façon préventive – et meurent en héros éternels au profit des «vieux» qui les dirigent à partir de leurs bunkers. Les actuels enfants-soldats mettent davantage cet état en lumière. Par ailleurs, dans les concerts armés, l’interdit du meurtre applicable au seul sujet parvient à se dissoudre dans la masse afin d’obtenir son contre-pied: le soldat tue ou meurt pour sauver la patrie. Le meurtre groupal s’est dégagé de son interdit et acquiert l’emblème de l’acte héroïque. La pulsion incestueuse d’origine parentale est à entendre comme une imposition du même «dans » l’enfant et ce, afin de soustraire le parent à sa souffrance psychique confrontée au non-pensable de la mort. Elle produit de cette sorte une forme de clonage psychique. Ce qui se révèle comme une confrontation à une mort psychique pour le parent est ainsi inoculé à l’enfant sous forme d’une identification projective. L’enfant ne peut s’y soustraire car, dans un tel instant, il est lui-même confronté à sa propre survie psychique. Le parent trouve dans ce mode d’intrusion psychique un moyen de se perpétuer. Cependant, ce processus hors paroles et/ou déconnecté du système perception-conscience parental, induit de «l’étranger en soi» aux allures «d’objet incorporé» et par ailleurs, se révèle toxique pour l’enfant. Celui-ci se voit « délégitimé» dans ce qu’il perçoit et ce qu’il pense. Disqualifié dans ce qu’il est, son espace psychique est envahi par « l’autre » et l’indifférenciation est maintenue au profit du parent qui y gagne – momentanément – en économie psychique. La pulsion incestueuse d’origine parentale se présente – de prime abord – comme une pulsion de vie, visant à immortaliser le parent. Sous ses beaux atours, elle n’est pourtant qu’une vile dissimulatrice d’une pulsion de mort qui lui «colle» à la peau. La désintrication de ces forces antagonistes ne peut se réaliser qu’à travers un accès suffisant au langage symbolique. Cependant, son avènement est conditionné par la capacité parentale d’aborder ses propres souffrances relatives à la mort non-pensable afin d’y graver une forme symboligène. Il semble qu’à l’heure actuelle cette dimension soit mise en péril, notre société capitaliste mettant progressivement toute souffrance « hors-la- loi » et illégitime, validant de cette sorte la jouissance immédiate au dépens du désir. L’incestuosité chemine ainsi avec le désir, celui-ci étant envisagé comme une force tentant à recouvrir un manque originaire corrélatif à la mort non- pensable. Engoncée dans l’ambivalence humaine, l’incestuosité dénote de la peine à désintriquer «l’état de vie» de « l’état de mort» mais paraît somme toute motorisée par le manque originaire et l’évitement de la souffrance qui y est accolée. Dotée d’une rare insolence, elle traque l’individu dans chaque recoin de sa vie poussant gaillardement les portes de la scène institutionnelle… L’interdit de l’inceste est ainsi un désintricateur de «l’état de vie» face à « l’état de mort ». Il invite à différencier les espaces psychiques permettant l’accès à un «je» différent d’un «non-je». Il invite à la vie en transposant la souffrance de la finitude humaine dans le registre du symbolique. Témoin de l’ambivalence humaine, il fonde l’espace psychique de l’individu et plonge celui-ci dans la question existentielle. Cet interdit serait finalement un garant qui accompagne la pulsion de vie et son antagoniste, celle de la mort, afin d’éviter leur funeste fusion. Simultanément, il rappelle en permanence que l’une d’entre elles est le vainqueur annoncé à l’arrivée…

Documents joints

  1. La plupart des concepts de cet article sont développés dans Le Clef B., Fatales Déliaisons, Essai sur les Phénomènes violents, Differentiare, 2004.
  2. prénoms d’emprunt.
  3. Le mariage homosexuel est désormais légal en Belgique et aux Pays- Bas.
  4. Heritier F., Cyrulnik B., Naouria A. De l’inceste, Odile Jacob, 2000, p. 29.
  5. (Freud F., Totem et tabou, Payot,1965, p.186.
  6. Le Clef B., Fatales Déliaisons, Essai sur les Phénomènes violents, Differentiare, 2004, p.81-162, 229-253.
  7. Si ce terme, introduit par M. KLEIN désigne essentiellement les fantasmes d’attaques infantiles orientées vers le parent, j’envisage ici, l’existence de mécanismes semblables mais, d’origine parentale.
  8. Le Clef B., «Oedipe au carrefour des temps identitaires», in Fatales Déliaisons, Essai sur les Phénomènes violents, Differentiare, 2004
  9. J’entends ici que le sexe est non seulement différent au niveau anatomique mais qu’il s’inscrit dans la différenciation temporelle configurant l’espace psychique : l’enfant petit garçon n’a pas le «même» sexe que l’homme adulte, car sa capacité de le penser et sa fonctionnalité est liée à son temps de croissance. La remarque est similaire pour la petite fille vis-à-vis de la femme. A cela, il y a lieu d’adjoindre, qu’à la différence constitu- tionnelle s’allie celle d’une capacité de la penser imbriqués dans les particularismes d’une inscription historique du sexe féminin vis-à-vis du masculin. En effet, la question du sexe ne peut être désolidarisée de son histoire socio-culturelle.
  10. Le terme inceste est absent du code pénal français et belge. Il est inclus dans la loi relative aux abus sexuels à l’égard des mineurs.
  11. L’affaire Dutroux et Fourniret
  12. Outre le mythe olympien de la Création, bon nombre de mythes instituent la naissance de l’humanité à travers l’inceste, par ailleurs, souvent gémellaire.
  13. Dans le mythe olympien de la Création, l’infanticide fait suite à l’émergence du « couple » parental Gaia – Ouranos. Dans le mythe d’Oedipe, lointain descendant du couple originaire, l’infanticide précède le parricide et anticipe l’inceste.

Cet article est paru dans la revue:

Santé conjuguée, n° 37 - juillet 2006

Les pages 'actualités' du n° 37

« L’inceste, Monsieur, êtes-vous sûr qu’il soit vraiment interdit…? »

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