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Le Groupe Nord <-> Sud de l’intergroupe liégeois


Santé conjuguée n° 43 - janvier 2008

Les échanges entre ce qu’il est convenu d’appeler le Nord et le Sud gagnent en intensité et en importance. Les maisons médicales de Liège ont donc mis sur pied un projet ambitieux : créer un espace qui entretienne la réflexion sur ces échanges mais soit aussi un soutien au service de projets de développement.

« Personne ne libère autrui, personne ne se libère seul, Les hommes se libèrent ensemble ». Paulo Freire, Pédagogie des opprimés. Voici le dernier-né des groupes de l’intergroupe liégeois des maisons médicales. Il a surgi de plusieurs observations : • de nombreux travailleurs de nos centres ont une expérience du Tiers- Monde ; • plusieurs, même, sont originaires d’un pays du Sud ; • d’autres, parfois, sont repartis travailler vers les tropiques ; • de plus en plus de nos patients viennent aussi du Sud ; • plusieurs maisons médicales soutiennent des projets dans le Sud. Le 27 octobre 2005, l’intergroupe liégeois avait organisé une plénière sur la question des rapports entre le Sud et le Nord et sur notre rôle dans ce contexte. Nous étions dix-sept autour d’une table avec plein d’expériences à partager et les idées ont fusé. -« Le soleil continue jusque à présent de se lever à l’est dans les pays du Sud, mais jusque quand ?» -« On dirait le Sud » -« Non, non, tout ça, c’est le Nord ! » -« Que faire ? » -« Oui c’est ça, où Wallons-nous ? » -« Le Sud et le Nord sont une invention du Nord qui lui a permis de conquérir le Sud » -« N’oublions pas qu’historiquement, le modèle des maisons médicales est un modèle qui vient du Sud »…

D’un espace de réflexion au soutien de projets

Cette plénière a permis de lancer l’idée de créer un groupe Nord <-> Sud, avec une flèche qui va dans les deux sens, qui s’est constitué le 20 septembre 2006, avec tant d’objectifs, finalement résumés en trois points : 1. Proposer un espace de réflexion, de sensibilisation sur les échanges Nord <-> Sud • Que ce soit un lieu d’échange entre les équipes et leurs membres investis dans un projet Nord <-> Sud, entre ceux qui ont développé des actions et ceux qui l’envisagent. • Que ce soit un espace pour réfléchir aux actions à mener ici, avec nos patients du Sud, pour sensibiliser les autres, en lien avec d’autres organismes (Attac, Comité pour l’annulation de la dette du Tiers- Monde,…) ou pour mieux mesurer l’impact de nos gestes quotidiens sur le Tiers-Monde, voir pour agir sur ces gestes. • Que ce soit pour réfléchir à l’enjeu « agir ici ou là bas » ou diffuser des expériences de projets menés. •Organiser des conférences sur les questions touchant au développement. 2. Soutien à une personne ou une maison médicale investie dans un projet de développement • Créer un groupe de pairs non experts qui pourraient aider à la réflexion et jouer un rôle de soutien ou de questionnement par rapport à des projets nés dans des maisons médicales. • Soutenir les équipes dont un membre partirait un temps dans le Tiers-Monde. 3. Soutien direct d’un projet de développement ici ou ailleurs • Créer un groupe de pairs non experts qui pourraient aider à la réflexion et jouer un rôle de soutien ou de questionnement à des anciens de maison médicale qui travaillent dans le Tiers-Monde et qui se trouvent parfois seuls ou isolés dans des contextes difficiles. • Aide à l’accueil d’étudiants étranger en formation en Belgique. • Développement de jumelage. On notera les liens de parenté entre ce jeune groupe, actuellement constitué de neuf travailleurs et les zapmammistes d’une part, ancien groupe de réflexion politique de l’intergroupe liégeois qui s’est réuni de 2002 à 2004 et un autre groupe d’autre part, dont la fécondation in vivo un soir de 2005 dans un restaurant de la rue des Guillemins n’a pas débouché sur une naissance viable et qui voulait s’inspirer de l’expérience du Groupe pour une réforme de la médecine (GERM). Alors que le GERM travaillait à une réforme des soins de santé, ce nouveau groupe aurait du réfléchir à des actions autour de déterminants plus importants de la santé : les déterminants socio-économiques…

Réfléchir avant d’agir

Depuis le mois d’octobre 2006, le groupe Nord <-> Sud a organisé en soirée six conférences – débats dont quatre dans le cadre chaleureux de la Casa Nicaragua. Ces soirées répondent directement à notre premier objectif, pourraient répondre au deuxième (avis aux amateurs) et font mûrir le troisième. Pilar Carrasco Rodriguez, épidémiologiste dans le district de Motril (Province de Grenade) nous a présenté l’organisation des soins de santé en Andalousie, basée sur les zones et les centres de santé. Ceux-ci sont responsables entre autres de la prévention dans les écoles et les lieux de travail. Bruno Dujardin, à qui nous avions demandé de faire un bilan de trente ans d’aide au développement, nous a résumé les limites de l’approche pasteurienne et a tracé les grandes lignes d’une approche holistique et globale du développement, en précisant son concept d’efficience systémique. Un critère essentiel de qualité d’un projet de développement : le renforcement de l’auto-estime des populations bénéficiaires. Une autre soirée fut consacrée à la présentation de projets de jumelages et d’échanges de savoirs entre deux maisons médicales de Bruxelles et deux centres de santé du Sud (en Haïti et en Guinée Conakry), avec nos invités Jean Van der Vennet de l’Institut de médecine tropicale d’Anvers et Michèle Parmentier de la maison médicale de Maelbeek. Denis Porignon, après avoir dessiné le contexte historique et politique, nous a présenté un projet de coopération au long cours où le Centre scientifique et médical de l’université libre de Bruxelles pour ses activités de coopération au développement (CEMUBAC) soutient les soins de santé primaires dans des zones de santé de l’est du Congo. Au Congo où se bousculent 53 programmes verticaux appuyés par l’étranger, les autorités sanitaires résistent pour défendre leur approche horizontale. Philippe Denoël nous a fait partager son expérience d’appui à un dispensaire urbain de première ligne, avec recouvrement des coûts, en Guinée-Conakry. Le 6 décembre 2007, Arnaud Zacharie, directeur du département Recherche et plaidoyer du Centre national de coopération au développement devait nous présenter les différents acteurs de ’aide au développement en Belgique. Il l’a peu fait mais il a remarquablement passionné l’assemblée en mettant en scènes les différents acteurs et les rapports de force entre eux : les institutions internationales, les gouvernements et la société civile ainsi que les évolutions récentes. En février, nous participerons à un jeu de société de mise en situation dans un contexte du Tiers-Monde, présenté par le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-monde. En avril, des membres de maisons médicales, qui ont lancé une petite association de soutien à des projets de développement en Ethiopie discuteront les questions que pose ce type de projet. Ces soirées, qui sont des moments de réflexion et d’échanges au service de l’action (n’y aurait-il pas du Paulo Freire là-dessous ?) sont aussi des moments de convivialité. A ce niveau, la petite bière artisanale de la casa ne gâche rien. Notez qu’il y a aussi des jus de fruit. Tous les travailleurs mais aussi les patients des maisons médicales sont invités et même un public plus large est le bienvenu. En octobre 2003, Santé conjuguée consacrait son cahier à la problématique Nord-Sud. Voici comment il abordait le sujet. Les difficultés du Sud aux plans politique, économique, sanitaire sont connues, elles nous interpellent et souvent nous scandalisent. Mais il faut récuser les visions simplistes selon lesquelles, pour y remédier, il « suffirait » de changer les comportements du Nord dominateur et de porter massivement aide à un Sud incapable de prendre son destin en charge. Car, nonobstant la circonstance historique actuelle, il faut entendre que le Sud est un partenaire à part entière et qui a beaucoup à apporter. Dans cet esprit, nous vous proposons un cahier consacré à un aspect de l’échange égalitaire entre le Nord et le Sud et qui peut se ramener à une question centrale : comment, grâce à l’observation respective et l’échange de partenaires, le Nord et le Sud peuvent-ils améliorer leur pratique des soins de santé ? Nous commencerons par rapporter l’expérience de travailleurs des maisons médicales qui ont travaillé dans le Sud et comment leur réflexion et leur pratique des soins de santé en a été transformée. Ensuite, nous nous intéresserons aux initiatives de l’Institut de médecine tropicale qui propose aux maisons médicales d’accueillir des participants du cours pour la Promotion de la santé afin de développer une observation respective des pratiques. C’est dans ce cadre que des maisons médicales ont « échangé » pendant quelques semaines des travailleurs de santé avec des centres de santé du Sud. Nous développerons ensuite deux initiatives, celle de la maison médicale d’Esseghem, à l’origine de la création de la maison de santé Saint-Paul à Yaoundé, et celle de la maison médicale de Seraing, qui soutient le Centre de promotion campesinos El Molino en Bolivie. Les réflexions de responsables de la Fédération des maisons médicales participant à différentes missions en Tunisie, en Bulgarie et en Palestine nous conduiront à celles de Paul Demunck qui, devant le dénuement du secteur de la santé au Niger, nous pose deux questions : jusqu’à quand mentirons-nous à l’Afrique et aux Africains ? Quelle contribution les maisons médicales belges peuvent-elles apporter au changement urgent et nécessaire ? La « mondialisation » n’est ni un bien ni un mal : elle sera ce que nous contribuerons à en faire. Vous pouvez commander ce numéro au secrétariat ou le télécharger sur notre site http ://www. maisonmedicale.org/ ; cliquez sur Documentation, puis Santé conjuguée puis Archives, numéro 26.

Documents joints

Cet article est paru dans la revue:

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