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L’alternative n’est pas un itinéraire bis


Santé conjuguée n° 57 - juillet 2011

« Le modèle néo libéral tend vers une marchandisation des services y compris dans la santé et le social : un des effets est l’accroissement des inégalités devant la santé. L’individualisme résulte pour une part de cette fragmentation sociale et du détricotage de la solidarité ; il expose aussi à une grande fragilité. Le terrain des soins de santé est un bon terrain pour identifier ces tensions, les acteurs de cette dynamique, et les alliances possibles. Ceci implique un travail de dénonciation, d’information et de soutien aux alternatives citoyennes qui favorise des comportements individuels responsables et des revendications collectives citoyennes vers une organisation plus régulée, plus « saine » et plus socialement redistributrice. (…). La question des modes de vie et de consommation est transversale. Elle permet d’articuler tous les domaines de la vie sociale avec celui de la santé. Outre l’impact des logiques de marché sur la santé (alimentation, stress lié au surendettement, gestion des déchets et de l’environnement …) la lutte contre la marchandisation de la santé (privatisation des soins de santé, instrumentalisation financière de la recherche, introduction de la publicité, lobbies pharmaceutiques …) est un enjeu particulièrement important pour nos institutions. ». Extrait du dossier de reconnaissance Education permanente de la Fédération des maisons médicales
« …Ce modèle néolibéral est en place à l’heure actuelle presque partout au niveau planétaire. Les conséquences à l’échelle mondiale sont visibles partout : – inégalité croissante dans la distribution des richesses avec un transfert de richesses des populations pauvres vers les populations riches ; – diminution de l’accessibilité à l’enseignement, aux soins de santé, au logement, mais aussi à l’eau, la nourriture, le travail, à des degrés divers dépendant de la zone du monde où l’on se trouve. ». Extrait de la Charte des maisons médicales
Ces deux citations, extraites de documents fondant l’action des maisons médicales et de leur Fédération, parlent d’eux-mêmes et explicitent l’importance que revêtent à nos yeux les initiatives citoyennes qui proposent des alternatives concrètes au fonctionnement actuel de la société.
Pourquoi choisir la voie de « l’alternative » ? « Identifier la résistance contre le néolibéralisme à celle contre une dictature a quelque chose d’artificiel, qui nous plonge dans la virtualité : un régime d’oppression ou d’occupation est un élément qui tente de s’imposer dans une situation pour devenir hégémonique mais qui ne la constitue pas en soi. Alors que le capitalisme, lui, n’est pas un soubresaut historique : c’est une forme de civilisation, un long cheminement de la pensée, de la culture, de la vie, dont nous faisons tous partie ». Résister, c’est créer, Florence Aubenas et Miguel Benasayag, La Découverte et Syros, Paris 2002
C’est pourquoi nous privilégions le réformisme révolutionnaire dont les « alternatives » constituent un instrument. « Le réformisme signifie que la voie légale est privilégiée pour opérer le changement (par exemple par des modifications de lois). La révolution violente (le grand soir, les rêves rouges, les drapeaux qui flottent et les barricades qui fument) pourrait être un autre moyen mais celleci est contestée en termes d’efficacité et d’opportunité, ce qui la rend souvent inutile, voire contreproductive. Le réformisme révolutionnaire n’empêche pas le recours à des actions « coup de choc » comme le squat, les manifestations, les grèves pour interpeller l’opinion publique, les responsables politiques ou autres. Le réformisme révolutionnaire signifie également un changement en profondeur. Il ne s’agit en effet pas de prendre des mesurettes pour que le système actuel reste globalement stable mais bien de faire basculer le système vers une société plus égalitaire, où il fera bon vivre. Le changement se veut radical même si la méthode est douce. ». « Pour un réformisme révolutionnaire », Coralie Ladavid, Santé conjuguée 54, octobre 2010
Une méthode douce que nourriront biodiversité culturelle, métissage des savoirs, éducation permanente, subversion, imaginaire et plaisir. La voie est étroite et le risque de « récupération » est réel : il ne s’agit pas de devenir un alibi en pansant les effets pervers du néolibéralisme, ni d’en devenir l’allié involontaire en déforçant l’Etat. D’où l’importance de ne pas démissionner du niveau politique. De ne pas se contenter d’être une réponse, mais de rester une question. De ne pas devenir une alternative aux services mais de continuer à poser un regard critique et à poser des actes « autrement ». De ne pas se contenter d’être une solution concrète mais de renvoyer les problématiques à la société. D’oeuvrer pour la transformer et la reconfigurer, d’être l’outil de la transition. De ne pas céder sur les valeurs.

Documents joints

Cet article est paru dans la revue:

Santé conjuguée, n° 57 - juillet 2011

Les pages ’actualités’ du n° 57

Autour de la modification de la durée des études de médecine – Une réforme en demi-teinte

L’enseignement et la transmission des savoirs a toujours été une préoccupation majeure de la Fédération des maisons médicales. Plusieurs portes d’entrée peuvent être exploitées à ce sujet et l’une d’entre elles vient de s’ébranler. En effet,(…)

- Dr Hubert Jamart

Des mots pour ne pas parler que des maux… mais de la santé – 50 ans du GERM et de sa descendance

Des Cahiers du GERM à Santé conjuguée : 50 ans de réflexion et de publication sur la santé.

- Morel Jacques

Protection sociale et mode de développement

Quelle est la relation entre protection sociale de haut ni-veau et croissance économique ? Faut-il une croissance éco-nomique perpétuelle pour avoir un niveau de protection sociale à la hauteur des besoins, au nord et encore plus(…)

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Qu’est-ce qu’une alternative ?

On arrête tout, on résiste et c’est pas triste

Depuis la déclaration d’Alma Ata (1978), l’objectif « santé pour tous » se heurte à la montée en puissance du néolibéralisme et à l’aggravation des inégalités. Les forces de gauche semblent pour l’instant marquer le coup.(…)

- Dr Axel Hoffman

Alternative, une photo de famille

A quoi reconnaît-on une « alternative » ou, pour le dire autrement, une initiative citoyenne qui propose des alternatives concrètes au fonctionnement actuel de la société sur un mode plus égalitaire, solidaire et démocratique ? Des(…)

- Gaëlle Chapoix

Reprise d’entreprise par les travailleurs : se réapproprier notre avenir ?

Réappropriation, émancipation, citoyenneté : la reprise d’entreprise par le personnel… une possibilité pour les salariés de reprendre leur destin en main et une solution pour les patrons transmettre leur entreprise.

- Adam Fabrice

Les Groupes d’achat solidaires de l’agriculture paysanne (GASAP)

Les groupes d’achat solidaires de l’agriculture paysanne existent depuis maintenant cinq ans à Bruxelles. Le Réseau bruxellois des GASAP rassemble maintenant plus de 40 groupes. Une nouvelle forme de « panier bio » ? Pas vraiment,(…)

- Wyngaerden François

Mobile, autonome et solidaire

« Apprends à entretenir et à réparer ton vélo et tu rouleras toute ta vie ». En autonomisant les cyclistes dans l’entretien et la réparation de leur mode de transport, les Ateliers Vélos de la rue(…)

- Menet Béatrice

Pour une naissance à visage humain, en toute simplicité

Comment sortir de la logique de l’accouchement comme acte médical ? Par le partage d’expérience entre parents et le soutien aux compétences de chacun.

- Lévesque Caroline

L’aventure citoy-éolienne de CLEF

Un trait marquant des alternatives est leur dimension collective, démocratique et, volens nolens, politique. Le « projet fondateur » de la coopérative citoyenne CLEF, c’est la mise en oeuvre d’une démarche de coopérative et l’aboutissement d’un(…)

- Marchal Fabienne

La finance solidaire comme réponse aux crises que nous traversons

Il n’y a rien à faire contre les dérives de la marchandisation et de la financiarisation ? Faux !

- Attout Antoine

L’Espoir, créer son habitat

L’alternative, ce n’est pas inventer un nouveau modèle à reproduire, c’est innover, c’est développer un projet nouveau que d’autres pourront s’approprier par la suite sans le reproduire à l’identique. A Molenbeek, quatorze familles aux ressources limitées(…)

- Grandjean Carole

Lieux d’accueil de la petite enfance, carrefours du lien social

Souvent les services auxquels nous recourons sont organisés d’en-haut ou de loin et réduisent l’usager à un rôle de consommateur dépersonnalisé dont on n’attend que de la passivité. Ce n’est pourtant pas une fatalité, comme le(…)

- Verniers Quentin

L’Autre « Lieu », une ressource alternative à la psychiatrie dans la durée

Soutenir une position de questionnement du système dominant, continuer à accompagner ceux que ce système déshumanise ou abandonne, rester flexible et critique, refuser de perdre son autonomie et âme en devenant un service complémentaire… L’alternative est(…)

- Marchal Christian

Et les maisons médicales ?

Les maisons médicales sont-elles une alternative ? En quoi ? Regards d’usagers

Ils participent à des activités de maisons médicales en région liégeoise, bruxelloise et tournaisienne, activités qui participent au réseau éducation permanente de la Fédération des maisons médicales. Ils sont inscrits à la maison médicale, ou pas.(…)

- Ingrid Muller

Les maisons médicales, une alternative ? Vue intérieure

Les maisons médicales constituentelles une alternative, entendons par là une initiative citoyenne qui propose une alternative au fonctionnement actuel de la société ? L’ont-elles été, le sont-elles toujours ? En quoi, à quel prix ? Qu’en(…)

- Dr Axel Hoffman

Quelques réflexions pour fabriquer une histoire globale, intégrée, continue et accessible des maisons médicales

Une analyse « historique » met en exergue la nécessité « macro » de déployer des alternatives au système dominant, alternatives dans lesquelles les maisons médicales jouent un rôle à leur niveau.

- Dr Pierre Drielsma

Alternative et pouvoirs publics : un rapport ambigu

Les pouvoirs publics se déchargent-ils de leur responsabilité ? Réflexions à partir du secteur de l’insertion socioprofessionnelle

Des opérateurs privés constituent aujourd’hui des alternatives qui assument des tâches auparavant remplies par les pouvoirs publics. Cela pose des questions que nous envisageons ici dans le domaine de l’insertion des publics « éloignés de l’emploi(…)

- Moens François

Le réseau, pour nourrir et développer l’alternative : forces et faiblesses des approches systémiques et transdiciplinaires

Pour qu’il y ait alternative(s), il faut des réseaux et des militants

L’alternative, c’est du travail sur les limites, du travail dans la transversalité, dans la « biodiversité culturelle » et le métissage, c’est de la subversion et de l’imaginaire. C’est aussi faire cela ensemble, en réseau, mais(…)

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Le réseau, ou la mobilisation de membres autour d’objectifs communs

Depuis des décennies, des entreprises et associations de l’économie sociale se rassemblent et se solidarisent pour être plus fortes et mieux se développer. En Belgique francophone, c’est en 1981 que SAW-B – Solidarité des alternatives wallonnes(…)

- Huens Véronique

Pour un réformisme révolutionnaire : les chemins de transition

Au-delà des mots

L’alternative, ce n’est pas que concepts et analyses. Ca se vit. L’absurdité du post-post-modernisme, du monde « entre deux mondes », aussi. Ca se vit. Expérience vécue.

- Christian Legrève

L’alternative n’est pas un itinéraire bis

« Le modèle néo libéral tend vers une marchandisation des services y compris dans la santé et le social : un des effets est l’accroissement des inégalités devant la santé. L’individualisme résulte pour une part de(…)

- Dr Axel Hoffman

La théorie de la transition, comme éclairage pour les alternatives

A travers ce cahier, nous avons discuté de ce qui caractérise les alternatives, de leurs relations avec les pouvoirs publics et de leur mise en réseau. Cet article vous propose une grille de lecture basée sur(…)

- Gaëlle Chapoix

Introduction

Introduction

La Fédération des maisons médicales se préoccupe principalement de questions qui touchent à la santé. Pourtant, l’objectif final des maisons médicales, dès leur création, et encore aujourd’hui, c’est de changer la société. Vers un monde plus(…)

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