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Introduction : origines et méthodes du projet

Un travail en trois axes

En 2008, nous avons décidé de travailler sur le thème de la précarité au sein de la Plateforme liégeoise de promotion de la santé affective, relationnelle et sexuelle parce que nous nous heurtions tous à des situations désespérantes ; nous rencontrons depuis plusieurs années des situations de pauvreté, de désinsertion, auxquelles il nous est souvent difficile de répondre concrètement, voire même de trouver une attitude juste en matière d’écoute et d’accompagnement.

Ces difficultés mettent à mal nos balises, nos principes de travail, notre éthique ; il existe de nouvelles formes de précarité et des situations pour lesquelles il n’y a pas de solutions. Pire encore, le travailleur social est parfois amené à devenir agent de contrôle. Ce phénomène risque de s’amplifier (que nous demandera-t-on demain ?) : il faut être réactif !

Si nous prenons l’exemple des sans-papier, les décisions d’expulsion se prennent parfois en trois semaines, ce qui ne laisse pas à la personne la possibilité de comprendre les règles et de se défendre en toute connaissance de cause. C’est ça qui est inacceptable : les gens doivent toujours avoir la possibilité de se défendre. Si le travail d’un planning n’est pas d’empêcher une expulsion, il se doit d’informer les personnes sur leurs droits et de veiller à ce que ces droits soient respectés – ce qui n’est plus toujours le cas.

Nous constatons aussi qu’il existe des liens entre la précarité du public, celle des professionnels et des institutions : si l’on se penche sur la précarité du public, on touche très vite à celle des travailleurs. Nous voulions mieux comprendre les facteurs qui précarisent le public et les travailleurs pour adapter nos pratiques professionnelles et ainsi améliorer la qualité du travail ; au centre de nos rencontres, le partage des pratiques, des difficultés, la recherche de nouvelles pistes de travail.

Notre travail s’est construit autour de trois axes :

le lien travailleurs-usagers ;

le lien travailleurs-politiques ;

le lien travailleurs-usagers-politiques.

Co-construction

Dans un premier temps, nous avons dégagé les principaux facteurs de précarité sur lesquels nous souhaitions travailler en profondeur :

les zones de non-droit ;

l’absence de titre de séjour ;

l’accès aux soins de santé.

Dans un deuxième temps, nous nous sommes divisés en deux sous-groupes, dans lesquels chacun a présenté des situations vécues illustrant ces trois facteurs de précarité. Chaque sous-groupe a ensuite choisi l’histoire qui lui semblait la plus représentative et ces histoires ont été présentées à l’ensemble des participants, qui se sont tous sentis concernés par les situations racontées. Une analyse plus approfondie a alors été menée, pour identifier ce qui se fait, faire émerger les difficultés, pointer précisément les impasses. Il s’agissait aussi de mieux comprendre comment articuler « le bricolage », souvent centré sur la personne, avec une interpellation collective et globale du politique, du judiciaire, …

Dès les premiers échanges, nous avons fait différents constats communs :
les situations difficiles se multiplient et contrairement à hier, les travailleurs ne trouvent parfois pas de solutions ;

les usagers précarisés ont peu de place dans le lien entre professionnels et politiques,

il manque de structures d’accueil pour la petite enfance et d’infrastructures pour soutenir les jeunes parents isolés ;

le nombre de personnes sans-papier qui fréquentent les services représentés à la Plateforme ne cesse d’augmenter et la zone de non-droit dans laquelle ces personnes se retrouvent ne cesse de s’élargir (refus de l’aide médicale urgente en augmentation). Nous avons dès lors souhaité inviter des spécialistes (avocat, travailleurs sociaux) pour mieux comprendre la situation de ces personnes et le CLPS a organisé en collaboration avec le Centre régional pour l’intégration des personnes étrangères ou d’origine étrangère de Liège (CRIPEL), plusieurs formations aux droits des étrangers à l’attention du secteur de la promotion de la santé.

La richesse du travail intersectoriel

La grande force de la Plateforme, c’est qu’elle est intersectorielle ce qui permet de mener une réflexion transversale. Les situations exposées par les uns parlent aux autres. Nous nous y reconnaissons. Les liens entre les problématiques identifiées paraissent évidents. Certaines collaborations se sont amorcées au départ de réflexions menées à la Plateforme entre des services qui a priori n’avaient que peu de liens entre eux.

Notre force, c’est le décloisonnement.

Prenons un exemple : aujourd’hui, après deux ans d’échange de pratiques, nous pourrions défendre le sens que cela a de soutenir une association dans son combat alors que la problématique de la prostitution dont elle s’occupe ne nous concerne pas directement. Nous avons pris conscience que la décision politique de fermer les salons a un impact sur la santé des personnes prostituées qui fréquentent le planning et peut-être bientôt le CPAS, sur leurs enfants qui sont en lien avec le centre psycho-médico-socail et l’Aide en milieu ouvert, …

La Plateforme réunit des travailleurs de première ligne de tous les secteurs et d’obédiences diverses qui réfléchissent ensemble à des problématiques en étant dégagés des enjeux institutionnels. Avec les années, un lien de confiance s’est tissé entre les membres de la Plateforme. Elle apporte du souffle, du soutien, de l’oxygène. Elle permet également de se sentir moins isolé dans les difficultés. La réflexion qu’on y développe permet de renforcer notre vigilance dans notre travail, de nous interroger sur ce que nous faisons, sur le sens que ça a, sur le sens de nos choix. Se sentir soutenu pour être vigilant.

Cet article est paru dans la revue:

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