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Sélection de risque au sein des maisons médicales au forfait en Belgique. Mythe ou réalité ?


décembre 2022, Analyses et études

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Pratique-t-on, comme on l’entend parfois, une forme de sélection dans les maisons médicales au forfait ? N’y a-t-il pas une tendance à privilégier les patient.e.s en relativement bonne santé qui demandent moins de soins ? Ou soigne-t-on au contraire davantage les patients porteurs de maladies chroniques, nécessitant des soins plus lourds ?

Cette étude de Roger Van Cutsem, médecin en maison médicale et analyste au Service études et recherches de la Fédération des maisons médicales, lève le voile sur cette question en analysant la prévalence des pathologies chroniques au sein des patientèles de maisons médicales au forfait.

Résumé

Malgré ses nombreux atouts tant pour les patients que les prestataires de soins, le modèle de financement à la capitation (au forfait dans le langage courant) souffre encore de nombreux préjugés. Le travail réalisé par les maisons médicales au forfait est parfois mal connu des autres professions de la santé et peut amener de la méfiance, des craintes, voire des attaques non fondées. Parmi celles-ci, la sélection de risque (le fait de choisir des patients en bonne santé pour réaliser un gain financier) est un phénomène régulièrement évoqué par les opposants de ce type de financement pour le discréditer.

En effet, dans le cas où le forfait n’est pas bien ajusté au risque du patient, les prestataires de soins ont un intérêt financier à éviter les patients nécessitant les soins les plus lourds. En contradiction avec le modèle défendu par la Fédération des maisons médicales qui implique une mutualisation des moyens dégagés grâce à des patients en bonne santé (qui consultent peu) au bénéfice des patients qui le sont moins (et qui consultent plus souvent).

Par ailleurs, il a été largement démontré que les maisons médicales au forfait recrutent une patientèle plus précaire au sein de la population belge et que ces patients sont plus à risque de présenter un certain nombre de pathologies chroniques.

Lequel de ces deux phénomènes contradictoires de sélection de risque est prépondérant dans le cadre des soins délivrés par ses membres ? C’est la question à laquelle le Service études et recherches de la Fédération des maisons médicales a essayé de répondre en comparant les résultats de l’Enquête de santé 2018 et les données collectées en 2019 dans 51 maisons médicales au forfait de la Fédération participant au projet « Tableau de bord ».

Les résultats sont très clairs : pour 3 des 5 pathologies chroniques, à savoir l’hypertension, la dépression et le diabète, la prévalence est nettement (de +25 à + 50%) et significativement plus élevée dans les maisons médicales que dans les population wallonnes et bruxelloises.

La conclusion de cette étude est double :

  1. Il existe, au sein des maisons médicales au forfait étudiées, un recrutement à l’inscription d’une patientèle plus précarisée et donc significativement plus à risque d’être porteuse de pathologies chroniques.
  2. S’il existe une éviction des patients nécessitant des soins lourds, ce phénomène est non observable dans notre étude car marginal par rapport à la sélection « positive » décrite au point précédent.

Ces données objectives discréditent donc largement un argument souvent utilisé de façon péremptoire contre ce modèle de financement, par des adversaires qui méconnaissent le travail des équipes pluridisciplinaires des maisons médicales.  Contrairement aux patients, qui sont de plus en plus nombreux à choisir ce modèle de soins.

Retrouvez ici l’étude complète (.pdf).

Dans la presse

  • « Il faut nourrir un autre récit sur la médecine forfaitaire« , article paru dans le Journal du Medecin du 16 février 2023.
  • « Les maisons médicales au forfait pratiquent-elles une sélection des risques ?« , article du 13 février 2023 paru sur le site Medi-sphere.