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Dans les maisons médicales de Flandre


Santé conjuguée n°84 - septembre 2018

De Vereniging van Wijkgezondheidscentra (VWGC), l’équivalent néerlandophone de la Fédération des maisons médicales, a pointé quelques enjeux majeurs de la profession d’accueil au nord du pays.

Les maisons médicales restent très minoritaires en Flandre. Il n’y en a que trente et une en tout – dont dix à Gand, les plus anciennes. Elles y constituent une sorte de laboratoire en raison de leur forte implantation et du réseau qu’elles forment, notamment avec des acteurs et partenaires externes. En même temps, les autres maisons médicales ont elles aussi une fonction de laboratoire du fait qu’elles fonctionnent davantage en solo là où elles se trouvent. Malgré une image de cohésion, une apparente homogénéité et une volonté politique d’uniformisation, elles sont très différentes les unes des autres, elles ont des historiques différents : quelques-unes ont été fondées par des médecins qui y ont débuté leur carrière, d’autres ont été créées à l’initiative de la société civile (des organisations travaillant autour de la pauvreté), d’autres encore sont issues de pratiques qui se sont converties en maison médicale. On retrouve encore parfois trace de ces différentes « cultures de base », même après plusieurs décennies.

Des bénévoles à l’accueil

Chaque maison médicale organise différemment son accueil. Par manque de moyens ou par conviction, certaines travaillent avec des bénévoles. Six d’entre elles, satisfaites de ce système, ont décidé de le conserver. C’est entré dans leur culture. Cela permet aux patients de se reconnaître plus aisément dans le personnel lors de cette première rencontre et cela favorise un accueil à un très bas seuil. Un autre avantage est de « libérer les professionnels » pour qu’ils puissent se consacrer davantage aux personnes qui en ont le plus besoin. Le recours à des bénévoles se fait tant dans les anciennes maisons médicales que dans les plus récentes. La formation et le degré d’inclusion de ces accueillantes varient aussi énormément, découlant de choix. La VWGC organise chaque année un cycle de formation pour les accueillants bénévoles et professionnels. On y aborde le comportement à adopter face à une agression, face à une tentative de suicide… L’enjeu actuel est de développer ces formations. Les médiateurs interculturels La médiation interculturelle existait déjà bien entendu avant la création de ce terme, qui a cependant permis de mieux définir la fonction. Plusieurs générations de médiateurs interculturels (intercultureel bemiddelaar) se sont succédé. Il s’agit d’une sorte d’accompagnateur qui recueille les questions et les doutes des usagers comme des travailleurs entre l’accueil à proprement parler et le cabinet du professionnel. Son but n’est pas seulement d’adapter l’usager aux médecins et autres professionnels de la santé, mais d’adapter l’équipe de la maison médicale aux patients. Le médiateur interculturel chemine avec ceux-ci dans les interstices de la maison médicale et participe en ce sens pleinement de l’accueil. Cette fonction nous rappelle que l’accueil se joue à tous les niveaux d’une maison médicale et qu’il concerne tous les travailleurs (il y a, a priori, un premier moment d’accueil dans chaque rencontre). Dans les plus anciennes maisons médicales, cette médiation est très fortement ancrée, elle fait partie de leur ADN. Il existe aujourd’hui des formations à la médiation interculturelle, en dehors des maisons médicales. Cette évolution entraîne une autre manière de faire l’accueil, l’idée étant que le développement de l’accueil va améliorer le développement de toute la maison médicale, soins compris. La langue revêt une importance particulière. Il s’agit d’accueillir des personnes ne parlant pas le néerlandais, de faire des efforts et d’essayer de communiquer différemment en sortant de sa zone de confort. À Gand, dans les quartiers à forte population turque, plusieurs médecins et médiateurs culturels ont appris et parlent couramment le turc. En général, on essaye de recourir à une langue commune : si le néerlandais est impossible, on utilise le français ou l’anglais. Dans plusieurs maisons médicales, les messages du répondeur téléphonique sont enregistrés dans ces trois langues. Faute de langue commune, on fait appel à des interprètes (en personne ou en ligne). Il faut certes reconnaître qu’il n’y a pas partout la même ouverture et on pourra demander au patient de faire l’effort de s’exprimer en néerlandais. C’est le résultant d’une attitude un peu plus rigide, mais parfois aussi une façon de stimuler une attitude d’intégration.

Réorganisation de la première ligne

Contrairement à Bruxelles et à la Wallonie, les maisons médicales en Flandre ne bénéficient pas de financement régional. Comme la sixième réforme de l’état transfère l’organisation de la première ligne aux régions, les maisons médicales en Flandre seront impliquées dans un projet de réforme de l’organisation de la première ligne globale. L’idée de cette réorganisation est de diviser la Région en zones d’environ 100 000 personnes (habitants, patients potentiels). Dans ces zones seront créés des réseaux regroupant tous les soignants de la première ligne, l’assistance sociale et tous les acteurs du secteur du bien-être. Tous les acteurs seront obligés de s’inscrire dans une zone et de clarifier leurs rapports avec les autres intervenants de la zone. L’objectif est d’y parvenir d’ici à 2025. Comment ? Le chantier est en cours… Seul le cadre est défini. Les décrets sont en phase de rédaction et la faisabilité locale est à l’étude. L’intérêt de ce mode opératoire est qu’il laisse beaucoup d’espace pour une coopération personnalisée dans chaque zone. D’autre part, cela risque d’aboutir à la nécessité d’aligner tout le monde si la personnalisation conduit à un paysage trop morcelé. Un cadre plus élaboré, pour lequel les maisons médicales pourront apporter des idées, aurait eu notre préférence. On assiste par ailleurs à une utilisation croissante d’internet. Le patient va devenir propriétaire de son dossier médical et va pouvoir prendre les décisions. Deux conséquences notoires : le risque d’ajouter des obstacles pour les plus vulnérables, et l’augmentation de la charge administrative des médecins. Ce dernier point va rendre impossible d’exercer seul et requérir le développement d’une fonction d’assistant pour prendre en charge ce travail. Un poste qui se rapproche de celui d’accueillante en maison médicale… Il y a donc là une opportunité pour en exporter l’esprit et les savoirs. Mais aussi un risque de glisser vers la privatisation des soins de santé et vers la création « d’assistants de pratique », comme aux Pays-Bas où ces derniers se chargent aussi de « sélectionner » les patients.

Documents joints

Cet article est paru dans la revue:

Santé conjuguée, n°84 - septembre 2018

Introduction

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