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Un enfant atteint d’otite banale en salle d’urgences d’un hôpital universitaire ?


Santé conjuguée n° 58 - octobre 2011

Face au recours inapproprié aux médecins spécialistes – ici, l’exemple des pédiatres – la vice-présidente du Groupement belge des omnipraticiens – GBO en appelle à une redéfinition des tâches et à une réelle collaboration entre spécialistes et généralistes.

Communiqué de presse Les soins de santé devraient être organisés en un système cohérent où chaque spécialité a sa place, ses missions et un financement adapté à ses missions. La première ligne de soins, celle du premier recours, c’est celle de la médecine générale, et l’on peut estimer qu’elle peut résoudre 90% des problèmes de santé. Pour ces 90%, l’utilisation des deuxième et troisième lignes de soins est inutile, entraîne une surcharge paralysante du travail en salle d’urgence, génère un coût inapproprié et exorbitant et peut même être iatrogène (est iatrogène un problème de santé provoqué par une intervention médicale même en l’absence d’erreur médicale ; c’est plus fréquent qu’on ne le croit). Mais depuis des décennies, ni la profession médicale et ses représentants majoritaires ni les pouvoirs publics n’ont voulu d’une organisation rationnelle des soins de santé ! En particulier, beaucoup de pédiatres ont choisi d’organiser leur profession en pratique privée privilégiant la surveillance du développement des enfants… mission par excellence d’une médecine générale et préventive. Ce faisant, ils désertent les salles d’urgence hospitalières pédiatriques et sont moins disponibles pour les pathologies aigues et les urgences. Et cela avec le risque d’une déspécialisation pour certains d’entre eux ! Dans ce même temps, dans certaines régions, les médecins généralistes ont vu disparaître les enfants de leurs salles d’attentes, en partie (particulièrement les enfants en bas âge) ou en journée. Ils ont perdu un pan de leurs activités et par là même certaines compétences (on ne fait bien que ce qu’on fait régulièrement). Bizarrement, ces compétences ne leur sont pas déniées après 19 heures et le week-end, ou pour les plus pauvres, qui n’ont pas accès financièrement à la médecine spécialisée privée ! Les patients, quant à eux, ont pris l’habitude d’appeler leur pédiatre… qui, souvent, conseille lui-même le recours en salle d’urgences comme solution lors de son indisponibilité. Quel est le pédiatre qui renseigne de vive voix ou sur son répondeur qu’il peut être utile de contacter son médecin de famille qui jugera de l’utilité d’en référer au spécialiste pédiatre ? De même, quels sont les gynécologues, les cardiologues… qui conseillent ce trajet de soins raisonnable ? Ne nous étonnons donc pas qu’une otite banale arrive en salle d’urgences, quand le pédiatre traitant est indisponible, ou même que l’enfant soit hospitalisé pour attendre l’Oto-rhino-laryngologiste le lendemain ! Augmenter les quotas de médecins spécialistes en pédiatrie permettra-t-il de résoudre le problème ? Y aura-t-il plus de pédiatres spécialistes en salle d’urgences ? Si les pédiatres ne s’organisent pas, cela n’aboutira qu’à une augmentation du nombre de pédiatres exerçant uniquement en pratique privée et sur rendez-vous. Cela accentuera encore le phénomène de confiscation des enfants aux généralistes et le risque de perte de leurs compétences dans ce domaine… Si les pédiatres et les généralistes n’acceptent pas de redéfinir leurs missions respectives et leurs collaborations réciproques, cela ne règlera en rien le recours abusif aux salles d’urgences et la paralysie des services d’urgences avec la dégradation des soins qui y sont prodigués. En termes de santé publique, il y a urgence à accepter le concept de cette réorganisation des soins de santé que nous revendiquons depuis tant d’années.

Contexte

Le communiqué de presse réagit à une situation connue mais dont la sensibilité s’est exacerbée après un article du Dr Jean Evrard, chef de département au centre hospitalier universitaire de Namur. Paru dans l’hebdomadaire Le Généraliste du 3 novembre 2011, l’article proposait, en riposte à la pénurie de pédiatres en salles d’urgences, la création d’une mini-spécialisation en pédiatrie pour le généraliste, avec compétences affûtées et numéro INAMI spécifique, de la mise en place d’une hotline et de « postes de santé pédiatriques ». Interrogés sur la teneur du communiqué, des membres du GBO insistent sur les points suivants : 1. Le propos premier de ce texte est bien la demande insistante d’une réorganisation des soins de santé. Confrontés à des délais de la médecine spécialisée parfois intenables au vu de la nécessité médicale, les membres du syndicat demandent une réelle collaboration entre médecins généralistes et médecins spécialistes pour résoudre ce problème. 2. Malgré la critique, il faut souligner que, sur le terrain, certaines collaborations avec la médecine spécialisée sont remarquables. 3. Le vieillissement de l’âge moyen des généralistes et leur organisation plus fréquente en rendez vous peut contribuer à la baisse de recours à leurs soins pour les enfants : les jeunes parents vont plus facilement vers de jeunes médecins, espèce qui se raréfie ; d’ autre part, les jeunes parents sont peut-être plus anxieux que par le passé, et si le généraliste est moins disponible, ils voudront une réponse rapide à leur angoisse, d’où les urgences. Une pratique associative assurant une disponibilité plus étendue (du matin au soir) permet de voir davantage de jeunes enfants. Certains généralistes en maison médicale déclarent voir une grande proportion d’enfants. 4. Le problème du financement des prestations hospitalières des pédiatres peut expliquer en partie la désertion des pédiatres des hôpitaux. Il est important de s’y intéresser syndicalement pour permettre aux pédiatres de réintégrer valablement les hôpitaux.

Documents joints

Cet article est paru dans la revue:

Santé conjuguée, n° 58 - octobre 2011

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