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Les missions du Fonds des Maladies Professionnelles


Santé conjuguée n° 51 - janvier 2010

Les missions du Fonds des Maladies Professionnelles (FMP) consistent à appliquer la loi de l’assurance maladies professionnelles. Celle-ci permet de faire bénéficier les personnes qui y sont assujetties d’un certain nombre de droits comme la perception d’une indemnisation pour une incapacité temporaire ou permanente de travail, les frais de soins de santé, l’écartement du risque professionnel, le paiement d’une rente au conjoint survivant en cas de décès.

L’assurance maladies professionnelles

L’assurance maladies professionnelles (M.P.) est gérée par le Fonds des Maladies Professionnelles (FMP). Cette institution publique de sécurité sociale est actuellement placée sous la tutelle du ministre des affaires sociales et du ministre de l’emploi. Elle est également soumise au contrôle du ministre du budget. Sa mission est d’assurer l’application des lois coordonnées, arrêté royal (AR) du 3 juin 1970, qui ont pour but de régler la réparation des dommages résultant de maladies professionnelles et de promouvoir la prévention de celles-ci. Son financement est assuré par le paiement des cotisations obligatoires par les entreprises tombant sous l’application de la loi. Le Fonds des Maladies Professionnelles (FMP) Sa composition est la suivante : un comité de gestion paritaire, un conseil scientifique, un service administratif, un service médical, un service prévention et détermination du risque professionnel. Qu’est ce qu’une maladie professionnelle ? Il n’y a pas de définition générale d’une « maladie professionnelle ». De plus, toute maladie contractée au travail n’est pas considérée comme maladie professionnelle. Pour entrer en considération, la maladie doit avoir été provoquée par le travail et il faut la distinguer de l’accident du travail qui résulte d’un événement soudain. Il existe, dans notre pays, une liste officielle (http://www.fmp-fbz.fgov.be/fr/listes_fr01.htm) des maladies professionnelles reconnues et qui donnent lieu à une indemnisation. La liste belge contient environ 140 rubriques, soit des agents causaux, soit des maladies. La présomption d’origine, qui s’attache à toute maladie figurant sur la liste, dispense le travailleur de devoir fournir la preuve de l’origine professionnelle de l’affection et la relation de cause à effet entre la maladie et l’activité exercée, à condition que cette activité l’expose au risque professionnel de la maladie. C’est une présomption irréfragable. Fixée par arrêté royal, cette liste est en fait établie après avis du conseil scientifique (http://www.fmp-fbz.fgov.be/Pdfdocs/Rapports/premieres_statistiques_2008.pdf). Ce dernier est par ailleurs assisté par des commissions de spécialistes et d’experts, par exemple la « commission des maladies respiratoires ». La modification de cette liste officielle doit être approuvée par le comité de gestion du FMP.

Le risque professionnel

Le législateur a tenté de définir la maladie professionnelle via la notion de « risque professionnel » reprise dans l’Art. 32 des lois coordonnées : « La réparation des dommages résultant d’une M.P. […] est due lorsque la victime de cette maladie, a été exposée au risque professionnel de ladite maladie […] ». L’alinéa 2 précise cette notion : « Il y a risque professionnel lorsque l’exposition à l’influence nocive est inhérente à l’exercice de la profession et est nettement plus grande que celle subie par la population en général et dans la mesure où cette exposition constitue, dans les groupes de personnes exposées, selon les connaissances médicales généralement admises, la cause prépondérante de la maladie ». Il n’est cependant pas exclu qu’une maladie ne figurant pas dans la liste des maladies professionnelles trouve malgré tout sa source dans la profession exercée. Il faut dans ce cas satisfaire à certaines conditions pour obtenir une indemnisation. Ainsi, dans ce système « hors liste », également appelé « système ouvert », le travailleur ou la travailleuse doit apporter la preuve d’un lien « direct et déterminant » entre sa profession et la maladie contractée. Le système ouvert constitue souvent l’antichambre de la liste des M.P. comme cela a été le cas pour l’asthme professionnel dû au latex et le sera sans doute prochainement pour les tendinopathies.

Qui est assuré ?

Toute personne occupée en tant que salarié est assurée contre les conséquences d’une maladie professionnelle. Il en va de même pour les étudiants et les élèves exposés au risque d’une telle maladie. Les administrations publiques provinciales et locales (communes, C.P.A.S, etc.) sont aussi assurées par le FMP pour les membres de leur personnel. Des règles particulières s’appliquent pour les travailleurs des entreprises publiques autonomes (S.N.C.B., La Poste, etc.) ainsi qu’au personnel du secteur public. Quant aux travailleurs indépendants, ils ne sont pas couverts par l’assurance maladies professionnelles. Les droits à l’assurance maladies professionnelles
  • Les frais de soins de santé : ils ne sont remboursés que lorsqu’ils sont en rapport avec la maladie professionnelle qui a été reconnue. Le FMP rembourse le ticket modérateur. Ceci concerne tant les frais d’hospitalisation, que les médicaments et les honoraires des médecins, kinésithérapeutes, etc., à concurrence du tarif INAMI. A cet effet, il existe des formulaires spécifiques (S.S.1, S.S.2, S.S.3) que le prestataire de soins doit compléter. Les soins médicaux autres que ceux prévus dans la nomenclature INAMI ne peuvent être remboursés que s’ils sont prévus par la nomenclature spécifique du FMP.
  • L’incapacité temporaire (I.T.) de travail : les indemnités prévues ne peuvent être accordées qu’à la condition que l’I.T. de travail soit d’au moins 15 jours et que la demande soit introduite durant cette période ou à défaut, durant celle où se manifestent les symptômes de la maladie. Le FMP verse une indemnité journalière égale à 90% de la rémunération de base plafonnée. La loi a fixé un maximum et un minimum pour la rémunération de base indexée chaque année. Au 1er janvier 2009, le montant maximum annuel s’élevait à 36.809,73 euros et le montant minimum à 5.717,93 euros. Les pourcentages d’incapacité sont donc calculés à partir de ces montants. L’incapacité temporaire est bien le reflet de la perte de gain économique et c’est elle qui est compensée.
  • L’incapacité permanente (I.P.) de travail : lorsque les conséquences de la maladie deviennent permanentes, une indemnité pour I.P. de travail est octroyée. Cette indemnisation ne peut prendre cours, au plus tôt, que 120 jours avant la date à laquelle la demande en réparation a été introduite. Dans ce cas précis, l’incapacité permanente a deux composantes qui sont généralement méconnues et qui doivent être clarifiées.
Tout d’abord, le service médical définit un taux d’invalidité physique de 1 à 100% en fonction de grilles qui lui sont propres. Si ce taux est inférieur à 100%, des facteurs socioéconomiques (F.S.E.) peuvent être rajoutés par l’Administration, en tenant compte de la perte des moyens concurrentiels sur le marché du travail. Le taux d’I.P. ne reflète donc pas seulement l’invalidité physique mais aussi d’autres facteurs tels que l’âge, les qualifications, la capacité d’adaptation, le marché de l’emploi en fonction de la situation géographique de la victime. Ces F.S.E. sont supprimés à l’âge de 65 ans. Ce taux d’I.P. peut être revu en cas d’aggravation et ne peut jamais excéder 100%. Pour des raisons budgétaires, le montant de l’indemnité est réduit lorsque le taux d’incapacité permanente est inférieur à 10% en vertu de dispositions légales spéciales.
  • L’écartement du milieu de travail nocif : il est destiné soit à éviter le développement d’une M.P., soit à éviter que cette dernière ne s’aggrave. Si l’intéressé(e) accepte cette proposition, il (elle) a droit à des avantages spéciaux. Il s’agit d’une prime équivalant à 3 mois de rémunération d’incapacité permanente totale de travail (100% du salaire de base).
  • «L’aide d’une autre personne » : il s’agit d’une allocation complémentaire se rajoutant à l’I.P. Cette aide intervient pour des victimes de cancers professionnels (pulmonaire, mésothéliome).
  • Les allocations en cas de décès : elles sont octroyées sous la forme d’une rente annuelle au conjoint ou au cohabitant légal survivant et à l’orphelin. Elles sont égales à 30% de la rémunération de base de la victime décédée.
  • Le remboursement des frais funéraires : à concurrence d’au maximum 30 fois le salaire quotidien moyen.
Comment introduire une demande d’indemnisation ? La manière dont une demande doit être introduite auprès du FMP est déterminée par l’AR du 26.09.1996 : elle doit se composer d’un formulaire administratif (501F) et d’une attestation médicale (503F) (http://www.fmpfbz.fgov.be/fr/formulaires_fr01.htm). Force est de constater que dans plus de 50% des cas, les demandes en réparation pour M.P. sont incomplètes : soit les formulaires permettant d’identifier le demandeur et son employeur, soit les documents médicaux (scanner du thorax, épreuves fonctionnelles respiratoires, etc.) sont manquants. Ceci ralentit considérablement l’instruction du dossier et la décision médicoadministrative qui en découle. Or les victimes de M.P. graves, comme les cancers, sont en attente du remboursement des frais de soins de santé suite aux nombreuses hospitalisations ou traitements de chimio et/ou radiothérapie. L’ensemble du corps médical doit être conscient qu’à défaut des documents réclamés, l’Administration se voit bien souvent contrainte de rejeter la demande en réparation, privant du même coup la victime potentielle de ses droits sociaux et de la perception d’indemnisations. Ainsi, dans les cas de demande en réparation pour cancer pulmonaire, l’attestation médicale 503F devrait comporter : le rapport médical de mise au point, le rapport anatomopathologique ayant permis le diagnostic, les clichés du scanner du thorax et les résultats de l’analyse minéralogique lorsqu’une exposition à l’amiante est suspectée.

La décision de réparation

La confirmation du diagnostic de M.P. et l’évaluation de l’incapacité physique (invalidité) relèvent uniquement de la compétence du service médical du FMP. La conclusion médicale de l’expertise se fonde sur l’avis d’une commission de médecins spécialistes et de médecins du travail, après évaluation du risque professionnel par un ingénieur industriel du service détermination et prévention du risque. In fine, cependant, la décision de reconnaissance appartient à l’Administration. Elle est toujours notifiée par un envoi recommandé à l’intéressé(e). Les compléments d’informations relatifs à cette décision médico-administrative, qu’elle soit positive ou négative, doivent être réclamés auprès du service médical. Ils seront transmis, avec l’accord écrit de la victime, au médecin de son choix.

Contestation de la décision

Elle est possible en introduisant dans l’année qui suit la notification, un recours auprès du tribunal du travail de la région de l’intéressé(e). Les frais de procédure sont pris en charge par le FMP quelle que soit l’issue de la procédure, sauf ceux de l’avocat et/ou du médecin de recours.

Documents joints

Cet article est paru dans la revue:

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