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Les acteurs, les scénarios


Santé conjuguée n°81 - décembre 2017

Médecin généraliste, médecin du travail, médecin-conseil. Accident de travail, maladie professionnelle. Incapacité ou invalidité. Qui fait quoi dans quel cas.

Le médecin traitant

Le travailleur a le libre choix du médecin qu’il consulte pour apprécier si son état de santé lui permet d’exercer son activité professionnelle. S’il ressort de l’anamnèse, de l’examen clinique et, le cas échéant, d’examens techniques ou d’avis spécialisés que le patient présente des contre-indications physiques ou mentales à l’exercice du travail pour lequel il est engagé (travail convenu), le médecin traitant l’en informe. Il encourage aussi son patient à se renseigner auprès de services compétents concernant la législation relative au bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail, à la procédure de reclassement et aux droits sociaux en cas de déclaration d’inaptitude. Il l’informe également de la possibilité de consulter spontanément le conseiller en prévention-médecin du travail pour des plaintes liées à la santé en relation avec le travail. Avec l’accord de son patient, le médecin traitant lui-même peut demander au conseiller en prévention-médecin du travail qu’il examine le travailleur. Si le médecin traitant estime son patient définitivement incapable de poursuivre le travail convenu pour cause de maladie ou d’accident, et que le patient souhaite entamer une procédure de reclassement, il lui remet une attestation le déclarant définitivement incapable de poursuivre le travail convenu (spécifique) rédigée en honneur et conscience. Le médecin du travail ou conseiller en prévention Le médecin du travail fait partie du service de prévention et de protection au travail (interne et/ou externe) auquel l’employeur est affilié. Il consulte dans des centres médicaux, dans l’entreprise elle-même ou en car médical. L’employeur a l’obligation de prendre les mesures nécessaires afin de promouvoir le bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail. Le conseiller en prévention-médecin du travail l’assiste dans l’application de ces mesures. Il donne son avis sur l’environnement et les postes de travail. Il repère les risques éventuels, assure la surveillance de la santé des travailleurs, dépiste aussi précocement que possible les maladies professionnelles, propose des solutions de travail adapté pour les collaborateurs dont l’aptitude à effectuer un travail est limitée. Il évalue également l’aptitude du travailleur à l’exécution de son travail habituel lors de la reprise du travail. Le médecin du travail joue un rôle dans l’incapacité de travail, mais il n’est jamais de son ressort de contrôler si un travailleur est légitimement absent ou non (c’est le rôle du médecin contrôle). Les recours contre ses décisions sont adressés à la Direction régionale du contrôle du bien-être. Le médecin-conseil de la mutualité du patient Le médecin-conseil travaille pour une mutualité et consulte dans les bureaux de cette mutualité. Il exerce sa fonction au nom de l’Inami. Il contacte la plupart des travailleurs en incapacité de travail au-delà de la période de salaire garanti (plus de deux ou quatre semaines). Il évalue l’incapacité de travail du patient (il vérifie la perte d’au moins les deux tiers de sa capacité de gain), il analyse sa situation médicale en la replaçant dans le contexte professionnel. C’est à lui de décider si un patient est toujours reconnu en incapacité – et peut prétendre aux indemnités correspondantes – ou s’il est apte, à partir d’un moment, à reprendre son activité ou une activité adaptée (horaires allégés, poste de travail aménagé, changement de fonction…). Le médecin-conseil examine avec l’assuré les démarches envisageables pour contribuer à sa réinsertion professionnelle, complète ou partielle. Les recours sont adressés au tribunal du travail local. Les médecins-conseils et les médecins du travail sont amenés à entrer en contact avec le médecin traitant du patient, qui a prescrit la mise au repos. Moyennant l’accord du travailleur, le médecin traitant peut leur transmettre des informations sur son état de santé.

Le médecin contrôle

Le médecin contrôle est mandaté et rémunéré par un employeur pour apprécier l’état d’un collaborateur absent pour cause de maladie ou d’accident, en se rendant à son domicile pour l’examiner (en cas d’absence, il le convoquera à son cabinet). Il est chargé de vérifier la réalité de l’incapacité de travail et d’évaluer si la durée du certificat est justifiée. Il peut se prononcer pour une reprise anticipée. En cas de désaccord entre travailleur et médecin contrôle, appel sera fait à un médecin-arbitre. Les contrôles médicaux sont généralement considérés par les employeurs comme un moyen de limiter l’absentéisme.

Le médecin agréé par l’Onem

Il est désigné par le directeur du bureau du chômage pour évaluer une inaptitude au travail permanente d’au moins 33% sur la base d’un certificat médical. Si celle-ci est reconnue, le médecin agréé dresse la liste des secteurs d’activités professionnelles dans lesquels le chômeur reste apte à travailler. Ces informations sont transmises par le bureau du chômage au service régional de l’emploi, qui en tiendra compte pour accompagner la personne dans sa recherche d’emploi et, le cas échéant, dans le cadre de la procédure de contrôle de la disponibilité active à laquelle elle est éventuellement soumise. Cette évaluation, obligatoire ou facultative selon les cas, vise à vérifier à tout moment si le travailleur remplit toutes les conditions pour pouvoir prétendre aux allocations. Un examen médical du travailleur peut être demandé quand le caractère convenable de l’emploi doit être jugé à la suite de son abandon pour raisons médicales ou en cas de licenciement pour force majeure. Le médecin agréé intervient aussi, entre autres, lorsque le travailleur perçoit une indemnité pour inaptitude permanente au travail à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou une indemnité pour inaptitude au travail ou invalidité versée par un organisme étranger ; lorsqu’il peut être considéré comme inapte au travail au sens de la législation relative à l’assurance maladie et invalidité obligatoire ; lorsqu’il sollicite du chômage temporaire en raison d’une impossibilité temporaire de continuer à exercer son emploi pour des raisons médicales.

Qu’est-ce qu’une maladie professionnelle ?

Toutes les maladies qui ont un lien avec le travail ne sont pas nécessairement des maladies professionnelles. Il s’agit des maladies causées de façon déterminante et directe par l’exercice d’une activité professionnelle ou en lien direct avec les conditions de travail. Il n’est donc normalement pas possible de développer ce type de maladie en dehors de l’environnement de travail. Exemples : allergie cutanée aux produits de coloration (coiffure), intoxication au plomb (fonderie), surdité due au bruit (usine d’embouteillage). À côté de ces maladies « professionnelles », d’autres sont considérées « à caractère professionnel » parce qu’elles peuvent être causées (en partie ou aggravées) par le travail. Leur origine est multifactorielle. Exemples : lombalgie, dépression, burn out. Seules les maladies strictement professionnelles font l’objet d’une éventuelle indemnisation par le Fonds des maladies professionnelles. Il existe une liste de maladies professionnelles reconnues comme telles d’office par FEDRIS, l’agence fédérale des risques professionnels (née de la fusion du Fonds des maladies professionnelles et du Fonds des accidents de travail) et, par ailleurs, des demandes individuelles de reconnaissance comme maladie professionnelle.

Qu’est-ce qu’un accident du travail ?

Il s’agit de tout accident dont un travailleur est victime pendant et par le fait de l’exécution du contrat de travail, et qui est la cause d’une lésion. L’accident qui survient sur le chemin du et vers le travail (le trajet normal) est également vu comme un accident de travail. Un accident de travail suppose un événement soudain, une ou plusieurs causes extérieures, l’existence d’une lésion, un lien de cause à effet entre l’accident et la lésion. L’accident doit avoir eu lieu pendant l’exécution du contrat de travail et le fait de l’exécution du contrat de travail. Il ne doit pas nécessairement résulter une incapacité au travail. Il doit toutefois y avoir au moins des coûts médicaux (exception : un accident causant un dommage à des prothèses ou des appareils orthopédiques est également considéré comme un accident de travail sans qu’il doive être question de lésion).

Incapacité ou invalidité de travail ?

Lorsqu’un travailleur est dans l’impossibilité d’exécuter son travail en raison d’une maladie ou d’un accident, son contrat de travail est suspendu. Dans un premier temps, la rémunération reste à charge de l’employeur. Si l’incapacité de travail se prolonge, un revenu de remplacement est pris en charge par l’assurance-maladie obligatoire. Invalidité et incapacité de travail n’ont aucun lien avec l’affection médicale, mais avec la durée. Après la première année d’incapacité de travail, on parle de période d’invalidité. Les personnes reconnues en invalidité peuvent bénéficier de l’intervention majorée ainsi que de certains autres avantages (abattement fiscal, tarif réduit dans les transports en commun…). Ces dix dernières années, le nombre d’invalides a augmenté de 67,6%. De nouvelles règles sont entrées en vigueur le 9 janvier 2017, notamment concernant une reprise partielle du travail après une période d’incapacité. Indemnités Le travailleur ou le chômeur reconnu en incapacité de travail a éventuellement droit à une indemnité, dont le calcul tient compte de sa situation familiale, du salaire brut précédemment perçu ou de l’allocation de chômage. Ce calcul est effectué par la mutualité, qui verse le montant (limité par des seuils et des plafonds).

Documents joints

Cet article est paru dans la revue:

Santé conjuguée, n°81 - décembre 2017

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